1024418/05/1979POITIERS
« C’est bien une manifestation de fonctionnaires... », se seront dit certains, hier, au passage du défilé organisé à Poitiers par les grévistes de la Fonction publique. Par référence à l’image faite de sérieux mais aussi de quelque indolence, qui est celle du fonctionnaire pour les Français qui ne le sont pas. Loin de nous, l’intention d’en minimiser l’intérêt ou la portée, mais si ce fut une manifestation solide - huit cent à mille personnes - elle manquait en effet de « souffle » sinon de conviction. Les slogans, fermes et lancés avec vigueur, n’étaient guère repris...
Ce qui semble confirmer la difficulté des travailleurs de ce secteur à « faire passer », à faire entendre la sonnette d’alarme qu’ils tirent à propos de la « dégradation du service public », et leurs protestations face aux conséquences sur divers aspects de leur travail. Leur message, pourtant, nous concerne tous, et ce n’est sans doute pas pour leur plaisir qu’à l’appel de la CGT, de la CFDT et de la Fédération de l’Éducation Nationale, ils étaient hier en grève et pour certains dans la rue.
Comme toujours, des appréhensions régnaient à la veille de cette journée nationale sur la façon dont le mot d’ordre serait suivi. Hier matin au rassemblement promenade des Cours, les syndicalistes, sans déborder d’enthousiasme, étaient rassurés. Pour le secrétaire départemental de la CGT, « c’est une bonne manifestation, qui devrait faire réfléchir le pouvoir dans la négociation de demain... » (celle qui se déroule aujourd’hui à Paris pour la Fonction publique).
Dans le cortège, qui devait gagner le centre-ville puis la préfecture en passant par la rue Jean-Jaurès et la place de Gaulle, les enseignants appartenant aux syndicats de la FEN étaient les plus nombreux, grossis des personnels de l’Éducation et de l’Université. Les hospitaliers (et certains personnels de l’enfance inadaptée intéressés aux négociation salariales), les PTT, le Trésor, les communaux, la Fédération autonome des syndicats de police, etc... formaient le corps du défilé avec les personnels des divers services administratifs, de l’UGFF - CGT ou de l’UFFA – CFDT.
Les thèmes : l’emploi (« les 35 heures, pas de chômeurs », titularisation des auxiliaires, créations de postes etc...) lié aux conditions de travail, les salaires, l’accent étant mis sur les plus bas d’entre eux, les droits syndicaux et « action- négociation », traduisant à la fois l’appel à la mobilisatIon et l’exigence d’être entendu.
Une dimension nouvelle
Au terme du défilé, M. Veylit a pris la parole au nom des diverses organisations et devait notamment déclarer :
« Depuis des années, le secteur public, loin d’être un secteur privilégié, sert de banc d’essai à l’offensive anti-sociale du pouvoir. Qu’il s’agisse des salaires, des conditions de travail, d’emploi, de formation, des droits syndicaux ou des garanties statutaires, il n’est pas un domaine qui ne soit marqué par des reculs, des remises en cause, des dégradations.
« Mais l’attaque a pris ces derniers temps une dimension nouvelle : il s’agit pour le secteur public aussi, de supprimer massivement des emplois, de mieux se mettre au service du patronat et notamment des sociétés multinationales, de favoriser la privatisation de ses secteurs les plus rentables... Les premiers éléments connus sur le budget 1980 confirment la volonté du pouvoir d’aller vite et loin dans son entreprise... ».
Et pour la suite : « Que les tenants du pouvoir ne s’y trompent pas : dans le contexte actuel, cette grève unitaire aura des répercussions évidentes dans l’essor des luttes revendicatives. Au sein même de la Fonction publique, elle constituera un encouragement pour les diverses catégories d’agents à amplifier les mouvements déjà engagés... En dehors du secteur public, elle peut jouer un rôle d’entraînement.
« La balle demeure dans le camp du gouvernement : il lui appartient de répondre positivement à nos demandes, et de cesser ses manœuvres et atermoiements... Dès demain, nous attendons qu’il s’engage à négocier pour de bon et hors du cadre fixé par R. Barre dans sa lettre aux ministres de décembre 1978, c’est-à-dire hors du cadre de l’austérité et du redéploiement… » faute de quoi l’action se poursuivra et l’orateur a invité les participants à en envisager les modalités sans plus attendre.
Une délégation a été reçue à la Préfecture où les revendications ont été rappelées.
L’activité a été surtout perturbée dans l’Éducation, très diversement dans les autres services. Les organisations syndicales n’étaient pas dès hier en mesure de fournir des indications significatives sur la participation à cette journée, la préfecture, pour sa part, annonçait une participation de 18 pour cent pour l’ensemble des services, hors enseignement.
Photo : La manifestation place de la Préfecture
le 22/07/2023 à 15:49
Source : La Nouvelle République du Centre Ouest
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