0102729/05/1919POITIERS
Sous ce titre on nous écrit :
« Hier, dans une interview, un patron boulanger a bien voulu vous exposer son opinion sur les revendications de la Chambre syndicale des ouvriers boulangers. Me permettra-t-on d'en critiquer les points principaux ?
« D'abord je ne vois pas en quoi le prix de 12 francs par jour pour 2 fournées n'est pas une base sérieuse. Vous prétendez monsieur (membre des plus influents de la chambre syndicale des patrons boulangers) que la grandeur des fours varie de 35 à 80 pains. N'exagérez pas ! Les ouvriers syndiqués s'entendent à reconnaître que les fournées varient de 50 à 70 pains seulement.
« Où ils reconnaissent une juste rétribution de leur travail vous voulez y voir une exploitation scandaleuse à leur détriment. N'essayez pas de nous prendre avec du miel, sur le terrain que vous leur proposez - ce vieux système d'entente entre un patron tout puissant et un malheureux qui a besoin de vivre - ils y voient au contraire la perpétuation inhumaine de l'enrichissement du patron par l'esclavage de l'ouvrier.
« Ensuite vous poussez une exclamation au sujet des 2 kilos de pain par jour qui, de tout temps, ont été accordés à l'ouvrier. Pour réfuter votre propos je dis qu'un chevalier de la banquette, patron incompétent, seul, pourrait prétendre "qu'un ouvrier boulanger se « gave Il de pain pendant son travail", le verbe manger étant, sans doute, réservé à une classe plus élevée dans l'échelle sociale, mais un professionnel ne saurait le dire en parlant sérieusement. Ah ! non, dites-vous, c'est excessif ! Avez-vous bien pensé que sans cette rémunération en nature bien des familles d'ouvriers boulangers auraient dansé devant le buffet le ventre vide ?
« Mais la dernière phrase de "votre opinion personnelle" : « si les ouvriers boulangers de Poitiers ne touchent pas un salaire égal au minimum pratiqué dans les villes environnantes c'est que le pain est moins cher à Poitiers qu'ailleurs » est un prétexte légitime de nos revendications. Nous n'avons pas à nous occuper des moyens à apporter pour remédier à la hausse continuelle du pain à Poitiers mais nous voulons vivre et, dans notre modestie nous ne voulons, comme vous le dites, qu'un salaire égal au minimum de nos camarades. Oseriez-vous vouloir nous accorder moins ? Un peu d'humanité.
le 07/05/2020 à 14:55
Source : L'Avenir de la Vienne
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