1087024/01/1981CHATELLERAULT
Les sociétés SFENA et Crouzet ont décidé « un rapprochement en vue d’activités communes et, explique la direction SFENA, c’est à la fin janvier qu’une conférence de presse fera connaître l’issue de l'opération en cours ».
Pour l’instant, un protocole est mis en place. Les deux comités centraux d’entreprise ont été consultés sur les projets en décembre. Hier encore, pour éclairer les cadres, le PDG de la SFENA, M. Pagnard, était à Châtellerault. De leur côté, les syndicat CGT, CFDT et CGC, qui ont déjà effectué des démarches auprès des parlementaires ainsi que des deux ministres de l’Économie et de la Défense, ont manifesté leur opposition au protocole et à toute formule qui pourrait aboutir à une intégration dont la SFENA paierait les frais.
En quoi le processus actuel leur semble-t-il dangereux, voilà ce qu’ils sont allés - avec délégations et renforts - expliquer hier après-midi au sous-préfet. Essayons donc de recenser les points abordés au cours de l’entretien pour reconstituer à travers les déclarations qui nous ont été faites de part et d’autre l’essentiel du dialogue.
Le principe du rapprochement, pour toutes les raisons énoncées ci-dessous, n’emporte pas l’assentiment des syndicats qui y voient une menace pour la SFENA. Le sous-préfet en donne justification par l’idée gouvernementale de créer un groupe français de taille internationale (premier rang européen et deuxième rang mondial) apte à tenir tête à la compétition internationale. Le nouveau groupe avec ses sept mille salariés serait trois fois plus puissant que la SFENA .
Le risque de privatisation retient longuement l’attention des délégués syndicaux et quand leur interlocuteur leur assure que l’État s’assurera une minorité de blocage de 33,4 % dans le groupe, augmentant ainsi globalement sa participation financière, ils ne se montrent point convaincus, subodorant des manœuvres de regroupement d’actions dispersés pour permettre à des intérêts privés de reprendre le dessus.
Le statut social du groupe projeté préoccupe donc les salariés de la SFENA, qui redoutent la « dénationalisation » et la perte d’un certain nombre d’avantages acquis. Syndicalement parlant, l’objectif pour eux est d’obtenir l’addition des avantages. Le sous-préfet leur donne à entendre que la solution retenue risque plutôt d’être une solution moyenne étant entendu que chaque société a ses points forts et ses points faibles.
Sur le plan technologique, conscients (et fiers de leur avance), les délégués de la SFENA observent que des ingénieurs du groupe partenaire se trouvent déjà dans leurs ateliers. Ils se sentent dépossédés avant l’heure de procédés dont Crouzet, disent-ils, a besoin en raison même de son retard dans certains domaines.
En ce qui concerne les modalités de mise en place du protocole, ils s’étonnent que le volet « capitalistique » du montage financier et de la gestion dont l’entrée en vigueur est prévue pour juillet ait la priorité sur le montage social, relatif au statut du personnel, prévu pour décembre...
A noter que les syndicats font également part au sous-préfet de leurs incertitudes au sujet de la politique d’équipement aéronautique. « Les crédits d’études de Concorde ont été abolis ; enfin, n’est-ce pas sur notre insistance que l’on a consenti à équiper l’Airbus d’un moteur français avec, il est vrai, une participation américaine ? ».
Confirmation pour la deuxième unité de la SFENA
(objectif deux cent emplois)
Cela ne change rien au projet de la SFENA d’implanter, conformément à ce qui avait été annoncé au printemps dernier par MM. Monory et Abelin, une seconde unité de fabrication, M. Pagnard en a donné confirmation hier matin à l’occasion de sa visite. Cette usine sera implantée dans la zone industrielle Nord. Le sous-préfet (qui s’attira cette réflexion des délégués - « Tiens, vous semblez mieux informé que nos dirigeants ! ») croit pouvoir dire que la fabrication aura trait à l’électronique et à l’optique. L’accord pour l’achat des terrains ayant été conclu en novembre, la SFENA décide de passer dès maintenant à la construction de l’unité, d’en définir le programme, d’en prévoir le financement, de manière sûre dans des conditions très satisfaisantes le suivi projet ».
Après avoir fait observer qu’au plan national « le rapprochement de la SFENA et de Crouzet est celui de deux entreprises saines et en expansion » aboutissant à « un groupe dynamique et opérant sur un secteur porteur », le sous-préfet indiquant que la SFENA a pour objectif la création d’ici à 1984, de deux cents emplois dans sa seconde unité, se félicita de cette extension pour l’avenir du Châtelleraudais. Il persiste à y voir un élément positif pour l’économie, même si ses interlocuteurs craignent mutations, transferts ou encore compensations pour suppression d’emplois dans l’usine actuelle par suite du regroupement.
« Je ne peux rien vous garantir et je ne vous garantirai jamais rien » leur a dit le PDG qui, il est vrai, doit aussi compter avec la conjoncture.
le 21/09/2023 à 16:43
Source : La Nouvelle République du Centre Ouest
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