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1111905/10/1981CIVAUX

CFDT ET GSIEN VERSENT DE NOUVELLES PIÈCES AU DOSSIER DE CIVAUX

Inquiets de la tournure du débat sur l’énergie

Aucun des six réacteurs nucléaires que le gouvernement vient de décider de produire pour 1982-83 n’est évidemment destiné au site de Civaux, où les études étaient tout juste terminées. Ce projet de centrale reste donc « gelé », et son sort en principe suspendu au débat promis par le Parti Socialiste et le président. Non pas le débat parlementaire de cette semaine, mais un débat plus vaste et décentralisé, le « vrai débat démocratique » dont devra s’inspirer la politique énergétique au-delà de 1983.

Les modalités de cette consultation ne sont pas connues, mais pour autant les adversaires du projet de Civaux ne restent pas l’arme au pied. Lors d’une conférence de presse, l’Union régionale CFDT et le GSIEN (Groupement de scientifiques pour l’Information sur l’énergie nucléaire) ont réaffirmé la place qu’ils entendaient y prendre, en versant au passage de nouvelles pièces au dossier. Mais au préalable, ils ont manifesté leur inquiétude devant les premières décisions du gouvernement.

La CFDT en particulier relève « le non-respect des engagements pris qui visaient à geler 14 sites et à maintenir à 60 % la production d’électricité de source nucléaire ». Elle souligne sévèrement que « le choix qui vient d’être fait repose sur le même discours que celui tenu par la droite précédemment ». Plus grave encore, estime-t-elle, le fait que le gouvernement ait engagé sa responsabilité sur le débat de cette semaine : « Non seulement les parlementaires se prononceront avant toute consultation décentralisée, mais la majorité s’inclinera. Le débat démocratique est clos avant d'avoir commencé ». La CFDT estime que le gouvernement « s’est fait avoir par le lobby nucléaire », et n’hésite pas à voir « un test pour l’avenir démocratique du pays » dans la possibilité de trouver un compromis entre le choix du conseil des ministres et la position de la commission animée par Paul Quilès.

Au plan national, le GSIEN a été consulté par cette commission. Ses propositions sont rassemblées dans un document qui s’efforce d’abord de montrer que croissance économique et croissance énergétique ne sont pas indissociables. Les scientifiques insistent ensuite sur le fait que le problème du nucléaire ne se résume pas aux réacteurs, mais concerne tout le cycle des mines d'uranium (notre région est concernée là aussi) au retraitement et à la gestion des déchets. Ils dénoncent un certain nombre de « mensonges économiques » et d’incertitudes techniques (à propos des surgénérateurs en particulier). D’une manière générale, le GSIEN préconise la mise en place d’organismes d’étude indépendants des constructeurs et des exploitants du nucléaire, pour soumettre à l’arbitrage du politique des dossiers complets.

Le groupe de Poitiers vient d’ajouter une nouvelle contribution au dossier : une étude de M. Jean-Paul Carrière, maitre-assistant en Sciences économiques, sur « coûts et compétitivité de l’énergie nucléaire » où il recense tous les facteurs d’incertitude dans ce domaine (disponible au GSIEN).

Nucléaire et emploi

C’est évidemment davantage sur l’aspect économique et social du projet de Civaux, que la CFDT relance pour sa part le débat. Elle veut convaincre que la nouvelle politique énergétique doit rompre avec « la recherche du kWh le moins cher, qui se justifie en système capitaliste » pour au contraire « établir les liens entre choix énergétiques, type de développement et plein emploi ». Et sa thèse prend le contre-pied des arguments des tenants du projet, que la CFDT qualifie de « chantage à l’emploi », en affirmant qu’à l’inverse « en système capitaliste, plus on produit d’énergie plus on produit de chômeurs ».

A cet égard, la CFDT met l’éclairage sur un aspect du dossier jusqu’ici négligé.

Non seulement, dit-elle le nucléaire est le secteur industriel le moins producteur d’emplois (elle rapporte des propos désenchantés de Girondins et de Normands qui ont dressé le bilan des emplois après une implantation) ; mais en outre « le nucléaire supprime des emplois dans le pétrole (en nombre important), le charbon, l’électromécanique ». Il faut donc considérer le problème énergétique dans son ensemble et la CFDT a entrepris de chiffrer un bilan complet du nucléaire en matière d’emplois.

S’agissant du Poitou-Charentes, elle rappelle les conclusions de l’étude du GSIEN, selon laquelle l’implantation d’une centrale à Civaux jointe au maintien des tendances économiques passées aboutirait à une récession de l’emploi, tandis que sans Civaux, une politique vigoureuse d’économies d’énergie serait fortement créatrice d’emplois, plus encore si les énergies renouvelables étaient développées.

Des crédits sont réclamés pour la poursuite de cette étude.

Jusqu’à maintenant, face aux impressionnants moyens d’étude et de propagande d’EDF, la controverse n’a pu être alimentée que par le travail acharné et bénévole de quelques spécialistes. Pour informer complètement la population et les « décideurs », pour que le débat à venir « dépasse le simple bilan énergétique de la région et fasse réellement sortir tous les enjeux des choix », CFDT et GSIEN font des propositions sur son organisation, mais réclament aussi les moyens de mener à bien ce travail considérable.

 

le 10/10/2023 à 17:52

Source : La Nouvelle République du Centre Ouest

énergie, nucléaire, association

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