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La journée de dimanche

Hier dimanche, presque tous les trains ont été assurés dans toutes les directions.

A la gare de Poitiers, il y avait 179 grévistes sur 217 employés sédentaires à l'entretien ; sur 65 mécaniciens et 73 chauffeurs, il n'y avait que 5 grévistes.

Les services de l'exploitation n'étaient pas atteints par le mouvement gréviste ; tous les personnels des bureaux étaient à son poste.

Des convocations lancées par la Compagnie avaient informé chaque employé que tous ceux qui ne prendraient pas le travail seraient l'objet d'une demande de révocation immédiate adressée à la Direction.

Un ordre de mobilisation fut envoyé à 85 employés de toutes catégories.

Dès hier nombre d'uniformes bleus horizons, aux écussons de la 23e section des chemins de fer de campagne, ont été distribués aux employés.

RÉUNIONS DE CHEMINOTS

Les cheminots ont eu hier deux réunions dans la salle du Grand Séminaire.

A deux heures, au nombre de 200, ils se sont occupés de la question des salaires et de l'indemnité de 720 francs. La séance fut levée à 3 heures 1/2.

A neuf heures eut lieu la grande réunion où devait être traitée la question de la grève.

Des conférences ont été faites par des éléments étrangers, les citoyens Meunier, secrétaire de la Fédération socialiste de la Vienne et Barré, propagandiste syndicaliste, qui tous deux engagèrent les cheminots à tenir bon, jusqu'à ce qu'ils obtiennent complète satisfaction.

Après quoi deux cheminots, MM. Benet et Lepape prennent la parole. Ce dernier qui est un militant syndicaliste très actif et un délégué de la C.G.T. au dépôt, a déploré certaines défections et a vivement engagé ses camarades à faire la grève à outrance.

Sur sa proposition un ordre du jour proclamant la grève générale a été voté à l'unanimité. A la sortie de la réunion les cheminots se sont disloqués sans incident.

- En raison de la grève des chemins de fer la conférence syndicale organisée par les ouvriers des lignes télégraphiques, avec le concours de MM. Chaxe et Dutailly, n'a pas eu lieu.

LA JOURNÉE DE LUNDI - Le train présidentiel.

Le train présidentiel est passé cette nuit à 1 heure 2, à l'heure exacte prévue à l'horaire. Un incident s'est produit à Saint-Pierre-des-Corps où devait se faire le changement de machines.

Une équipe de chauffeur et mécanicien avait promis d'assurer la conduite du train. On l'envoya chercher en automobile à domicile mais elle se refusa à prendre son service. Deux chefs mécaniciens du dépôt furent dans l'obligation de prendre leur place.

LA SITUATION S'AGGRAVE

Ce matin la situation est la suivante :

Le nombre des grévistes était : agents des trains 7, agents des bureaux 2, agents de manutention gradés 4, non gradés 1, agents de manœuvre gradés2, non gradés 2.

Aux ateliers le nombre des grévistes reste le même ; mais on signale de nouveaux mécaniciens et chauffeurs qui adhèrent au mouvement.

LE DÉBAUCHAGE

Ce matin des incidents se sont produits à la rentrée des ateliers. Des grévistes ont essayé d'empêcher les volontaires de reprendre le travail.

Dans la matinée des mesures de police ont été prises pour empêcher le retour de semblables incidents.

L'ORDRE DE MOBILISATION N'EST PAS RESPECTÉ

Sur 86 employés mobilisés, 36 seulement ont répondu à l'ordre de mobilisation. Cette situation est grave. Les 50 autres vont être déférés à l'autorité militaire.

LE TRAFIC

Aujourd'hui les trains de Niort et de Parthenay n'arrivent pas. La situation parait d'ailleurs plus mauvaise sur le réseau de l'État que sur le P. O.

Le transport des denrées périssables, viande frigorifiée, bétail, est assuré tant bien que mal, mais nombre de train restent en souffrance. Les voies de garage de Saint-Benoit à Tours sont presque engorgées.

LES VICTIMES

L'omnibus du matin sur Châtellerault n'est pas parti ; plus de 80 ouvriers de la Manufacture d'armes de Poitiers, de Chasseneuil et des autres gares intermédiaires, n'ont pu, par la suite, rejoindre leur travail et se voient dans l'obligation de chômer malgré eux. Inutile de dire qu'ils sont très montés contre les cheminots.

LE SERVICE D'ORDRE

Le service d'ordre est assuré à la gare de Poitiers par une Cie du 125e, aux gares de Châtellerault et de Loudun par des détachements du 32e.

CET APRÈS-MIDI

Situation inchangée cet après-midi. On nous informe que les grévistes, réunis ce matin, auraient décidé d'inviter leurs camarades mobilisés à apporter à la permanence, au Grand Séminaire, leurs ordres de mobilisation et leurs uniformes militaires.

A CHATELLERAULT ET A LOUDUN

A Châtellerault, quelques employés qui avaient adhéré au mouvement gréviste samedi, ont repris le travail après une heure d'interruption.

A Loudun on annonce que les 2/3 des ouvriers du dépôt feraient grève.