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1170125/10/1982POITIERS

CONGRÈS DÉPARTEMENTAL DE FORCE OUVRIÈRE

« Le syndicalisme doit rester ce qu’il est… »

Le XVIIIe congrès de l’Union départementale Force ouvrière, qui se déroulait samedi aux Salons de Blossac, a été marqué par trois thèmes d’actualité : les difficultés économiques et sociales, les prochaines élections prud’homales (et les enjeux de ces deux thèmes pour le syndicalisme lui-même), ainsi que les événements de Pologne et leurs significations.

Les débats étaient présidés par Claude Jenet, secrétaire confédéral. Dans son allocution de clôture, sans minimiser ni les difficultés de la mobilisation, ni les manœuvres dont le syndicalisme peut être l’objet, il a appelé les militants de FO à s’atteler « sans complexe et avec courage » aux tâches qui les attendent, en continuant de pratiquer « le langage de l’honnêteté et en fondant leur confiance sur la progression actuelle de FO ».

M. Jean Serre a rendu compte à ce congrès de son dernier mandat de secrétaire général de l’UD : il a souhaité « passer la main » et la commission exécutive lui désignera prochainement un successeur.

Son rapport moral et d’activité dressait le bilan des deux ans écoulés depuis le dernier congrès. Du point de vue du fonctionnement de l’organisation : treize syndicats créés ou réactivés, mais aussi une insuffisance de moyens qui fait que la « prestation » servie ne répond pas toujours aux besoins ; un tassement des effectifs, mais en même temps une audience qui s’accroît aux élections professionnelles... Et un rappel de tâches auxquelles il a fallu faire face, ainsi que de l’analyse qui sous-entend cette action.

Cette analyse, on la retrouve dans les grandes lignes de la résolution finale adoptée par le congrès, qui commence par le constat de la dimension internationale de la crise et la nécessité d’y répondre, au-delà du cadre national, en construisant « l’Europe des travailleurs ». Cela dit, l’UD-FO de la Vienne « s’élève contre l’insuffisance des mesures gouvernementales » pour résoudre le chômage, « condamne la remise en cause des engagements » sur le pouvoir d’achat et déclare s’opposer à toute « politique rigide des revenus ».

FO réclame la mise en œuvre rapide du projet de centrale nucléaire à Civaux. Pour la création d’emplois dans la Vienne, le syndicat demande la consolidation de l’industrie existante et le développement notamment de l’agro-alimentaire, ainsi que des grands travaux d’infrastructures. FO s’oppose à toute augmentation des cotisations sur les salaires, à toute diminution des prestations sociales et au forfait hospitalier. Elle demande en outre une rémunération plus juste des apprentis « pour mettre fin à l’exploitation dont ils sont victimes », et pour les conseillers prud’hommes des moyens de formation juridique plus adaptés.

Montée des périls

On retrouvait évidemment ces grandes revendications dans l’intervention de Claude Jenet, qui devait les situer dans le contexte politique et économique actuel. La crise requiert « un plan Marshall » à l’échelle du monde, et en France les difficultés vont durer. Le syndicaliste a pour première tâche « d’expliquer ce qui se passe, sans excès mais sans faiblesse ». Il doit rester syndicaliste et par exemple, FO ne peut envisager pour les salaires de ne plus faire référence à l’évolution des prix, et en conséquence de signer un accord « qui ne mettrait pas les salaires à l’abri de l'inflation ».

S’ils ne sont pas prêts à une grève interprofessionnelle, les travailleurs selon lui « s’interrogent », et la confédération s’inquiète au plus haut point, non seulement de la gravité de la situation, mais par exemple de l’autoritarisme grandissant et de la volonté interventionniste de l’État, qui menacent la négociation collective ; ou encore de « l’obstination » du CNPF sur le problème du financement de l’UNEDIC.

M. Jenet dénonce la montée des intérêts catégoriels et du poujadisme, la tentation d’orienter les positions de FO, ou encore d’opposer les travailleurs du privé à ceux du public. Ces derniers, rappellent-il, ne sont pas opposés à une contribution-chômage, à condition qu’elle soit imposée à toutes les catégories.

Si les écueils se multiplient, « la marche à suivre reste la même », devait conclure le secrétaire national. FO « refuse de s’ériger en modèle de société, toutes les opinions politiques sont dans la classe ouvrière et toutes doivent y cohabiter », comme elle refuse de « taire ses revendications », tout en reconnaissant que les travailleurs, d’eux-mêmes, savent prendre la mesure des difficultés du moment...

« Solidarité » et notre solidarité...

Mme Françoise Baluka, dont le mari Edmund, responsable de « Solidarité », est emprisonné depuis plusieurs mois, participait à ce congrès. La veille au soir, à la Maison du peuple et devant 200 personnes environ, elle avait animé un meeting d’information et de soutien à la lutte du syndicat polonais indépendant.

Nourri de son expérience personnelle et de sa participation maintenant au combat clandestin, son témoignage et ses réponses étaient riches de touches vécues, souvent « tragi-comiques » comme elle dit, sur la vie quotidienne des Polonais. Mais aussi d’analyses et de commentaires percutants sur la situation politique du pays.

Pour elle, il n’y a pas de question : « La force n’a pas triomphé du Droit. Solidarité existe et vaincra, car tout le peuple est contre le pouvoir et on ne délégalise pas son propre peuple »... La militarisation et la répression, plus anciennes et plus dures qu’on ne l’imagine et qu’on ne le dit en Occident, n’y feront rien, selon Françoise Baluka : « Le système communiste ne marchait pas quand nous avions encore l’espoir de traiter avec lui, comment voulez-vous que cela marche maintenant qu’un ouvrier travaille quand il sait que c’est pour les tanks et les baïonnettes ? ».

Pour en sortir, elle a souligné « l’énorme importance d’en parler encore et toujours en France et d’agir, même en petit nombre et modestement, avec ceux qui veulent faire quelque chose ».

« Solidarité », qui prépare un solennel « appel au monde » en faveur notamment de Walesa, a besoin de la solidarité de la classe ouvrière occidentale, car la marge de manœuvre de nos gouvernements s’arrête à des limites diplomatiques... Claude Jenet devait plus particulièrement appeler les syndicats FO à continuer de faire de l’information sur la Pologne, et constituer des « comités de parrainage » de Polonais détenus ou menacés. En précisant : « Nous sommes directement concernés parce que la démocratie est fragile, cela file entre les doigts ».

 

 

le 22/11/2023 à 18:08

Source : La Nouvelle République du Centre Ouest

congrès, international, solidarité

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