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0118223/05/1920POITIERS

LA GRÈVE DES CHEMINOTS - INTERVIEW DES GRÉVISTES POITEVINS

On sait que la Fédération nationale des Cheminots de s'est pas inclinée devant le vote du Conseil national confédéral qui a décidé, hier matin la reprise du travail à une imposante majorité.

Les cheminots poitevins, très disciplinés nous devons le reconnaître, ne veulent connaître que la décision de leur fédération à l'exclusion de toutes autres, Ils continuent donc la grève avec le même ensemble que précédemment. Ce matin à la gare la situation était- inchangée, il ne fut constaté aucune rentrée. Aucune nouvelle révocation n'est intervenue.

Nous nous sommes présentés à la permanence, à la chapelle du Grand Séminaire et, après avoir parlementé pendant quelques instants, nous avons pu avoir un entretien avec l'un des chefs du mouvement qui, après quelques hésitations au début, finit par répondre à nos questions.

Nous nous contenterons de reproduire notre conversation dont les lecteurs tireront eux-mêmes la morale.

- Alors vous continuez la grève ?
- Oui, jusqu'à ce que nous obtenions complète satisfaction.
- Qu'entendez-vous par : "obtenions complète satisfaction" ?
- Nous voulons que nos revendications aboutissent. Au premier rang se trouve la nationalisation, mais nous ne voulons pas du projet déposé par M.Trocquer ; nous saurons exiger qu'on prenne en considération le projet de la CGT.
- Mais vous savez que la nationalisation ne peut être réalisée d'un trait de plume, que les transformations de l'exploitation - en admettant qu'on' en vienne à vous obéir - ne pourront se faire du jour au lendemain. Attendrez-vous donc, pour reprendre le travail, que le projet fut devenu un fait accompli ?
- Bien entendu non, il suffira qu'on nous fasse la promesse formelle d'examiner notre projet et de le soumettre au parlement.
- Mais si le gouvernement vous donne, sur ce point, satisfaction il est fort probable que le parlement ne le suivrait pas, alors ?
- Alors ? Ce serait à voir, mais nous en avons assez de nous mettre en grève tous les quatre matins, nous voulons en finir une fois pour toutes.
- Votre politique est donc celle du tout ou rien. L'avenir nous dira quels résultats pratiques elle donnera. En attendant dites-nous quelles sont vos autres revendications ?
- Nous exigeons la réintégration de tous les cheminots à leur poste d'avant la grève, nous n'admettons pas la moindre sanction, si faible soit-elle. Les sanctions prononcées lors de la première grève doivent, elles aussi, être annulées, de même nous ne voulons pas que les ateliers de Tours et de Périgueux soient détachés du réseau.
- Fichtre vous n'y allez pas point de main morte. Mais est-ce tout ?
- Non point. La dernière condition que nous posons à la reprise du travail est celle du paiement intégral des journées de grève..
- A vous entendre nous sommes amenés à conclure que le conflit ne serait pas prêt de se terminer. Et tout aussitôt une question nous vient à l'esprit : comment, jusqu'auboutistes. pourrez-vous « tenir » jusqu'au bout, car vous n'êtes point, que nous sachions, des nouveaux riches encore que vos traitements vous aient peut être permis de faire quelques économies.
- Nous pouvons tenir plusieurs mois s'il le faut, nous avons de l'argent en caisse et de l'argent français. Des concours financiers nous viennent de toutes parts. Hier nous avons refusé une offre de vingt mille francs qui nous a été faite par un poitevin.
- Et qui donc ?
- Ça c'est notre affaire.
- Comment comptez-vous procéder ? Nous avons entendu parler d'un projet de soupes communistes.
- Il nous a paru plus simple de laisser à chacun sa liberté, nous donnons des secours aux camarades nécessiteux au fur et à mesure des besoins.
.../...

 

 

le 17/05/2020 à 17:09

Source : L'Avenir de la Vienne

grève, cheminots, révocation, solidarité

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