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0126130/08/1922POITIERS

CHEMINOTS - LES FRERES ENNEMIS

Le trésorier des cheminots, M. Chateaureynault ouvre son livre de caisse et nous fait connaître les largesses dont profita… le citoyen Meunier.

Le citoyen Meunier, secrétaire fédéral du parti socialiste (S.F.I.O.) raconte, paraît-il, à tout venant depuis une dizaine de jours qu’il va nous adresser une réponse cinglante. Comme sœur Anne nous ne voyons rien venir.

Du côté socialiste, du moins, car nous venons de recevoir une lettre fort intéressante de M. Chateaureynault, trésorier du Syndicat poitevin des chemins de fer, mis en cause par M. Meunier. Il nous apporte des renseignements nouveaux sur les grèves de 1920.

Le trésorier des cheminots écrit en effet :

Poitiers, le 28 août 1922

Monsieur le Directeur,

Mis en cause à plusieurs reprises dans votre journal au sujet du versement de la somme de 200 fr. au citoyen Barré, j’ai décidé, après avoir consulté mes camarades, d’apporter sur ce fait soulevé par Meunier les éclaircissements demandés par Sketch.

J’ai donc ouvert mon livre de caisse et j’y ai relevé :
1° Versé le 7 mai 1920, 200 fr. à Barré.
2° Versé le même jour, 120 fr. à Meunier.
3° Versé le 29 mars 1920, 100 fr. à Meunier.
4° Versé le 7 août 1919, 33,75 à Meunier, location des bancs, réunions du 7 juin et 3 juillet.

M. Sketch, qui relève tant de choses pourra relever que le citoyen Meunier a reçu des cheminots : 120 +100 + 33,75 = 253,25.

Il relèvera encore que Meunier, secrétaire du parti socialiste poitevin, alimentait je ne dirai pas sa caisse personnelle, en faisant payer aux cheminots le droit d’être assis.

Et moi, à mon tour, je relève que le citoyen Meunier qui attaque un homme dont le désintéressement est quasi proverbial doit aux cheminots la somme de 120 +100 + 33,75 = 253,25 ou alors les bancs que cette somme représente.

Car socialistes et syndicalistes s’étaient entendus pour l’achat de bancs en commun sous la direction commerciale de Meunier.

Elle est bien bonne ! Le secrétaire fédéral du parti Socialiste va se mordre les doigts et regretter d’avoir entamé cette polémique.

Pour nous qui n’entendons prendre parti ni pour le socialiste ni pour le communiste, nous nous contenterons de faire cette petite remarque que les cheminots, à l’époque de leurs grèves, étaient forts généreux. Nous n’aurons pas la curiosité de leur demander d’où venait l’argent, ni même de les prier de nous dire, s’il est exact, comme on le raconta alors, qu’un industriel poitevin leur accorda une subvention princière. Il est probable que M. Chateaureynault ne pousserait pas la franchise et la complaisance jusque-là.

Des chiffres qu’il produit, il convient de conclure que les politiciens coûtent fort cher aux syndicalistes lorsqu’ils viennent se mêler de leurs conflits avec le patronat. Avant de songer aux intérêts qu’ils sont sensés défendre, les gréviculteurs pensent tout d’abord à leur petite matérielle.

Le plus drôle, c’est que dans les milieux syndicalistes on paraît ne leur en garder aucune rancune, bien au contraire. Voyez le couplet dithyrambique que M. Chateaureynault consacre dans la suite de sa lettre au camarade Barré :

Quant au camarade Barré, nous n’avons rien à lui reprocher. Toutes les affirmations qu’il a produites sont vraies. Les insinuations de M. Sketch n’y changeront rien.

Je lui autorise à dire que nous restons les débiteurs de Barré et que nous sommes prêts à lui donner encore 200 autres francs et davantage s’il le veut.

Jamais notre ami ne nous a donné de mauvais conseil. Nous avons l’impérieux devoir de lui conserver notre sympathie entière qu’il a acquise par son dévouement, son courage employés a défendre la classe ouvrières contre les exploiteurs de la nation.

Nous disons hautement que nous sommes fiers de notre ami, de ses incontestables talents (?) auxquels des gens plus qualifiés que Sketch ont rendu hommage.

Nous ne pouvons oublier que Barré a failli être arrêté quoi qu’en dise M. Sketch qui perd bien son temps à vouloir abattre cet homme cent fois supérieur à lui à tous égards.

Et pour terminer cette lettre, la première et la dernière, car ma dignité d’homme utile à ses semblables ne s’accommode pas de ces disputes avec des gens inutiles, avec des parasites, j’affirme :
1° que c’est nous qui sommes allés chercher Barré à Montreuil-Bonnin ;
2° qu’il a été un mois à notre disposition et à la disposition de nos camarades de la région ;
3° qu’il ne nous a jamais rien demandé et n’a jamais posé aucune condition ;
4° que nous étions heureux de l’avoir à nos côtés pour expliquer aux masses ignorantes nos revendications, chose que nos moyens oratoires ne nous permettaient pas de faire ;
5° que, enfin, Barré dit la vérité au sujet de ses dons aux quêtes et du don fait par sa femme ;
6° qu’il ne reste donc rien des attaques de Meunier et Sketch.

Inutile de dire, n’est-ce pas, que cette lettre a été écrite en collaboration avec le camarade Barré. Communiste, d’ailleurs, M. Chateaureynault ne pouvait destiner ce document à la publicité sans prendre l’avis de son chef de file. Le Trésorier des cheminots se sert d’ailleurs de formules qu’il nous semble avoir déjà lues ailleurs. Ne serait-ce pas dans le Prolétaire, et sous la signature de M. Barré lui-même ?

Sketch

 

 

le 22/05/2020 à 11:11

Source : L'Avenir de la Vienne

histoire, politique

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