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1344216/06/1987POITIERS

DISSUASION OU… INCITATION À LA GRÈVE ?

L’amendement Lamassoure réveille les syndicats de la Fonction publique. A commencer par la CFDT et la FEN

Unité de lieu, de temps... mais pas d’action. La sacro-sainte règle du théâtre classique a été transgressée hier par les professeurs de lettres, et leurs collègues de l’Éducation Nationale et de toute la fonction publique à l’occasion de la journée d’action contre l’amendement Lamassoure voté vendredi soir à l’Assemblée Nationale. En effet, à 11 h 30, devant la Préfecture, il y avait bien comme prévu le rassemblement de la CFDT et de la FEN mais sans concertation préalable entre les deux organisations. A telle enseigne que le cabinet du préfet de région a reçu séparément deux délégations : l’une conduite par France Joubert, secrétaire général de la CFDT, l’autre par Roland Maurel, secrétaire départemental de la FEN. Quelque 150 à 200 manifestants se sont retrouvés devant les grilles recouvertes de banderoles et ont quitté les lieux sur le coup de midi après avoir écouté les comptes rendus des audiences.

Cet amendement Lamassoure (du nom d'un député UDF des Pyrénées-Atlantiques) qui menace de faire payer aux fonctionnaires l’heure de grève au prix d’une journée de salaire marquera-t-il malgré tout un réveil syndical ? C'est ce que laissent prévoir les discours publics. « Par ce rassemblement de nos responsables syndicaux », souligne France Joubert de la CFDT, « nous avons voulu dénoncer le coup bas du gouvernement qui porte atteinte à la fois aux libertés syndicales, aux droits du parlement (la commission parlementaire n’a pas été réunie) et au droit de grève (ni le conseil d’État, ni la commission supérieure de la fonction publique n’ont été saisis). C’est vraiment un coup de force par lequel la majorité politique pense régler ses problèmes internes sur notre dos ».

Pour le secrétaire de la CFDT qui réagit avec la fougue de son « patron », Edmond Maire, le refus de concertation du gouvernement pose de sérieux problèmes pour l’avenir ; notamment dans le cadre de la modernisation de la fonction publique qui devrait mobiliser prioritairement les énergies avec les négociations salariales : « Même les patrons, assure-t-il, ont compris qu’on ne pouvait progresser que dans la concertation. Avec cet amendement qui nous ramène à la loi de 1961 rapportée en 1982 par Anicet Le Pors, ce sont deux années de travail avec l’équipe Chirac qui sont fichues en l’air...

Du côté de la FEN, premier syndicat de la fonction publique, on se montre aussi très ferme sur les prix. « Nous considérons l’amendement comme une atteinte au droit de grève, et, au-delà, comme une atteinte aux libertés et aux droits de l’homme », estime Roland Maurel. « C’est un nouveau coup porté aux fonctionnaires ». Le représentant de la FEN a, en plus, la conviction que cette initiative, loin d’être ponctuelle, s’inscrit dans une politique cohérente qui vise à diminuer les garanties de la fonction publique. « Les collègues commencent à en avoir marre, ajoute-t-il. Bien sûr nous continuerons notre action... ».

Rendez-vous est donné jeudi 18 juin à 11 heures à la préfecture.

“Je ne connaissais pas ce Monsieur Lamassoure“

12 h 45 à la cantine de la recette principale des PTT. Retour de sa tournée quotidienne à Montbernage, Gilbert attaque son dernier virage pour gagner le garage à vélo et secoue son ciré ruisselant de pluie : « L’heure de grève permet de se défendre plus facilement car les copains ne sont pas toujours prêts à perdre une journée ».

« C’est une incitation à la grève, observe malicieusement un agent administratif principal, car il vaudra mieux désormais faire grève une journée plutôt qu’une heure !.. ».

Ce n’est pas vraiment une surprise : tous les autres avis recueillis parmi les postiers vont à peu près dans le même sens, qu’ils soient ou non syndiqués. « Je ne suis pas d’accord », souligne Sylvie, pourtant non gréviste. « Je ne connaissais pas ce Monsieur Lamassoure, avoue Nade, du service général ; ce n’est pas bien de faire passer ainsi des lois au petit matin ». « Ça n’apportera pas des voix à la majorité pour les présidentielles » prévient Christian, du service bâtiment.

C’est l’unanimité… moins une voix. Celle d’une représentante de la direction générale qui pense qu’il est trop facile de faire une heure de grève de temps en temps. « Il suffit, estime-t-elle, de choisir au centre de tri, le moment du chargement et tout est bloqué »

Photo : Le rassemblement devant la préfecture

 

 

le 22/05/2024 à 08:21

Source : La Nouvelle République du Centre Ouest

fonction publique, loi, droit, rassemblement, PTT

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