1370020/04/1988POITIERS
Les conflits sociaux se multiplient et l’on note sur le terrain une apparente unité d’action des syndicats
En ce début de printemps, les mouvements sociaux éclatent comme bourgeons au soleil : ce sont les salariés de la SNECMA à Châtellerault (construction de moteurs d’aviation) qui multiplient les débrayages depuis quatre semaines pour obtenir une augmentation égale de 1.500 F par mois ; les fondeurs d’AE France à Chasseneuil (fabrique de pistons) qui barrent l’entrée de leur usine pour protester contre le principe des primes au mérite attribuées, selon eux, « à la tête du client » ; les délégués du personnel de Howard-Rotavator à Loudun (fabrique de houes rotatives et machines à vendanger) qui tiennent un comité d’entreprise extraordinaire pour réagir contre les menaces de licenciements ; les postiers qui se liguent tous syndicats confondus, pour sauver douze postes... Sans compter le personnel de la Télémécanique de Chasseneuil qui, dans le droit fil de l’union sacrée scellée avec la direction pour chasser le « vampire » Pineau-Valencienne, participent à un référendum.
Coïncidence ? Que la CGT, syndicat « pur et dur » fasse le forcing depuis quelques mois n’a rien de surprenant. Mais on remarque qu’elle est de plus en plus rejointe sur le terrain par les autres confédérations qui avaient tendance à appliquer jusque-là une démarche plus participative. Ce retour apparent vers une unité d’action a-t-il pour but de donner un contenu social à une campagne des présidentielles qui en manque passablement ou bien s’agit-il d’ores et déjà de préparer le « troisième tour » ?
« Aucun lien avec la prochaine échéance électorale, assure Jean-Louis Blouin, secrétaire fédéral adjoint de FO. Il y a des mois que notre confédération met en garde le patronat et le gouvernement en disant : on tire trop sur la ficelle, ça va casser ! ». Selon le porte-parole de FO, la perte de pouvoir d’achat est aggravée par une absence de dialogue social d’autant plus regrettable que la confédération ne cesse de prôner les vertus de la politique contractuelle.
A la CFDT, France Joubert, secrétaire régional, estime que l’effervescence actuelle a des origines complexes. Il y a des employés d’entreprises florissantes qui estiment le moment venu de toucher les fruits de leurs efforts, ceux des entreprises mal gérées qui manifestent leur mauvaise humeur, les salariés à temps partiel qui s’aperçoivent qu’ils gagneront moins que les 3.000 F proposés comme seuil de la pauvreté… Et puis, il y a le vide de la campagne électorale. « Avant, si les promesses n’étaient pas toujours tenues, il restait au moins l’espoir... ».
Il ne viendrait pour autant à personne de cracher sur la démocratie directe. Les télémécaniciens y croient même au point de l’utiliser à leur propre usage. Avec la couverture du professeur poitevin de droit social Jean Savatier, qui juge cette consultation « assez logique » à la condition qu’elle ait été précédée d’une information.
Michel Lévêque
le 18/06/2024 à 08:08
Source : La Nouvelle République du Centre Ouest
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