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Des affiches apposées en ville annonçaient qu’une manifestation aurait lieu cet après-midi sur la place de la Préfecture. Les commerçants de la ville étaient conviés à y participer pour protester contre « l’inégalité fiscale, la gabegie financière, l’inquisition et la taxe sur le chiffre d’affaires ».

Vers 2 heures on vit arriver sur la place une trentaine de commerçants, surtout des bouchers de la région de Neuville, Mirebeau et Vouillé.

Pendant une heure environ les manifestants causèrent entre eux, exprimant surtout leur déception de ne pas voir les commerçants de Poitiers.

Finalement ils décidèrent d’envoyer six délégués exposer leurs revendications à M. le Préfet ; deux seulement sont admis à pénétrer dans la Préfecture, MM. Chaumont, conseiller d’arrondissement de Neuville, et Thomas, boucher à Mirebeau. Les deux délégués furent reçus immédiatement par M. le Préfet, qui leur posa cette question préalable :
- Venez-vous au nom d’un groupement ayant une situation officielle, syndicat ou association ?
- Non, répondirent MM. Chaumont et Thomas, nous venons à titre personnel.
- Si vous venez, ajouta M. le Préfet, au nom des rédacteurs de l’affiche apposée à Poitiers, qui protestent contre la gabegie administrative et financière, je ne pourrais pas vous entendre, car je ne puis admettre qu’on s’adresse au représentant du gouvernement en termes aussi incivils.
- Pas du tout, répondirent les délégués, qui exposèrent que dans la région de Neuville et Mirebeau les agents du fisc exerçaient leur fonction d’une manière préjudiciable à leurs intérêts.

M. le Préfet invita MM. Chaumont et Thomas à formuler dans ce cas leurs plaintes par écrit.

Les délégués déclarèrent ensuite qu’ils tenaient surtout à protester contre le maintien de la taxe sur le chiffre d’affaires dont, aux dernières élections législatives, tous les partis ont promis la suppression.

M. le Préfet répondit qu’en ce cas les protestataires n’avaient qu’à se retourner vers leurs élus, s’ils estimaient que les promesses n’avaient point été tenues.

M. Brisard ajouta que si les protestataires formaient un groupement et venaient lui apporter un vœu conçu en termes courtois et corrects, il se ferait un devoir de le transmettre au gouvernement.

MM. Chaumont et Thomas remercièrent M. le Préfet de les avoir reçus et écoutés avec bienveillance.

Ainsi se termina la manifestation annoncée. Elle aura sans doute pour épilogue la constitution d’un groupement de commerçants.