0140603/04/1925POITIERS
Nous avons relaté hier, d’autre part, les incidents qui ont eu lieu à Paris, à l’occasion de la nomination de Monsieur Georges Scelle. A la suite des bagarres, des étudiants furent arrêtés et des condamnations prononcées. L’Association des étudiants lança alors un ordre de grève générale.
Cet ordre de grève parvint ce matin à l’Association générale des étudiants de Poitiers. Aussitôt les étudiants présents se rendirent en cortège chez M. Bigot, président de l’Association. Quelques-uns, une minorité, poussaient des cris hostiles à l’adresse du ministre de l’instruction publique.
M. Bigot, qui était souffrant, se leva et, tout d’abord, demanda qu’on cessât ces cris hostiles.
- Nous n’avons pas, leur dit-il à intervenir dans le différent dont la désignation de M. Scelle est la cause ; celui-ci a, en effet, été nommé légalement. Mais nous pouvons et même nous devons protester avec force contre les procédés qui ont été employés à Paris.
« Nous ne pouvons tolérer que la police soit introduite dans nos amphithéâtres et que des coups de matraque soient distribués, de même qu’il est inadmissible que nos camarades aient été emprisonnés.
« Mais nous ne voulons pas que la politique soit mêlée à nos revendications et je demande instamment qu’on cesse les cris susceptibles de faire interpréter notre mouvement comme une manifestation politique ».
Un hourrah retentissant accueillit ces paroles et on se rendit à l’immeuble de l’Association où une réunion eu lieu.
A l’issue de cette réunion l’ordre du jour suivant fut voté :
Les étudiants de l’Université, réunis à la Faculté de Droit, protestent énergiquement contre les charge brutales de la police au quartier latin, contre les poursuites dont viennent d’être l’objet plusieurs étudiants, contre la suspension de M. le doyen Berthélémy, se déclarent prêts à lutter pour la défense des libertés universitaires, demandent le retrait de la mesure prise contre M. Berthélémy, la mise immédiate en liberté des étudiants emprisonnés, la cessation des poursuites et l’amnistie pour ceux qui ont été condamnés.
La proposition d’une grève de trois jours fut également adoptée.
Le cortège se reforma ensuite et parcourut les diverses facultés.
A la Faculté de droit, MM. Savatier et Solus faisaient leurs cours ; les manifestants entrèrent dans les salles et M. Bigot expliqua aux deux professeurs quelles étaient les intentions de ses camarades. Les cours furent suspendus.
A la Faculté des sciences on interrompit de la même façon une séance de travaux pratiques.
Rue de la Prévoté il n’y eu aucune interpellation. Avant l’arrivée des manifestants les salles s’étaient déjà vidées.
Il n’y eut pas non plus d’incident à l’école de médecine où le docteur Beauchant interrompit son cours.
Le reste de la matinée s’acheva dans le calme.
A 14 heures, après une courte réunion à l’Association, M. Bigot et le vice-président, M. Cruard, se rendirent au rectorat où ils furent reçus par M. Pineau. Ils lui firent part de leurs décisions ; la manifestation serait pacifique, on se contenterait d’établir une permanence à l’entrée des salles de cours pour enregistrer les « dégonflards ».
M. le Recteur sortit fit quelques recommandations bienveillantes aux manifestants et un « monôme » d’une centaine d’étudiants parcourut les rues de la Ville en criant : « Liberté ! Amnistie ! » Un drapeau portait un drapeau et un autre une pancarte sur laquelle on avait écrit : « Libertés universitaires ».
La manifestation se termina alors après l’organisation des permanences aux diverses facultés.
le 29/05/2020 à 14:32
Source : L'Avenir de la Vienne
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