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0142416/07/1925POITIERS

UNE NOUVELLE INDUSTRIE POITEVINE – L’USINE DU PAIN BON MARCHE

La question du « pain cher » est de celles qui retiennent plus particulièrement l’attention des pouvoirs publics ; non pas que le pain ait atteint un prix très élevé par rapport à 1914 ; celui-ci est inférieur aux prix des autres denrées ; mais parce qu’il constitue l’alimentation de première nécessité et qu’il joue le rôle d’étalon dans l’établissement des prix.

Jusqu’ici, il faut bien le reconnaître, l’intervention des pouvoirs a été inefficace ; c’est tout au plus si la taxation peut retarder de quelques jours la hausse du pain commandée par celle du blé.

Si l’État ne peut agir sur le cours des blés, son action est nulle sur celui du pain. Mais alors un moyen se présente : s’efforcer de réduire les frais qu’entraîne la moulure du blé et la fabrication du pain.

Ce moyen qui échappe à l’État, parce que celui-ci ne peut songer à sortir de son rôle sans s’exposer à de graves déboires, l’industrie privée, elle, peut le tenter avec quelques chances de succès.

La panification moderne a déjà fait son apparition en France ; notamment à Lille, à Roubaix et à Angers où elle a permis une baisse appréciable du prix du pain.

Poitiers, dans quelques temps, aura suivi cet exemple grâce à l’intelligente initiative de notre compatriote, M. Gérard Hambis, dont le nom est connu depuis longtemps dans le monde industriel.

LE MOULIN APPARENT

En 1916, M. Gérard Hambis s’installait au Moulin apparent, bien connu des poitevins et fermé depuis longtemps. Il ouvrait aussitôt la minoterie et l’usine de peaux d’oies aujourd’hui en pleine prospérité.

C’est tout à côté – donc aux portes même de Poitiers – que s’élève actuellement l’usine « du pain bon marché ».

Et tout de suite nos lecteurs entreverront les conséquences de cette réunion des deux industries sans précédent jusqu’à ce jour, croyons-nous.

Plus d’ensachage, de longs transports de la farine ; une vis sans fin de 25 mètres l’amènera directement du moulin au fournil. D’où déjà économie de temps et d’argent.

LE FOURNIL

L’usine de panification comprend deux parties distinctes : le fournil et les fours à vapeur.

Le fournil où se prépare la pâte est une pièce de 300 m² absolument indépendante de la salle des fours et à l’abri des impuretés.

La farine amenée par la vis sans fin se déverse dans des pétrins mécaniques.

La pâte qui en sort est placée dans des appareils spéciaux qui la coupe et la roule à la vitesse de 60 pains à la minute.

LES FOURS A VAPEUR

Ces fours à vapeur, marque Flochet, d’un modèle tout récent, sont construits en brique et émaillés.

Au nombre de quatre et jumelés ils contiennent, chacun, trois chambres de cuisson (deux pour les pains ordinaires, une pour les pains viennois).

Le chauffage s’opère à l’aide de foyers à charbon entièrement indépendants du four proprement dit, de telle sorte que l’odeur du combustible ne peut y pénétrer.

Ces foyers chauffent des faisceaux tubulaires contenant un produit spécial.

LES CHAMBRES A FOUR

Douze chambres à four ou de cuisson pouvant contenir chacune 84 pains.

Seize batteries de tubes en acier, soit 240 tubes placés au-dessus et au-dessous de la plaque supportant la pâte peuvent entretenir une chaleur constante de 500° alors que la température normale n’est que de 350°

La vapeur d’eau produite par cette surchauffe provoque sur toute la surface du pain cette boursouflure légère si appréciée et que l’on nomme « grignage ». Seul ce procédé peut le donner.

Des projecteurs électriques permettent de surveiller attentivement la cuisson.

Du reste, de tels perfectionnements rendent le travail facile, rapide et conforme aux règles d’hygiène.

Une salle de douches et lavabos est mise à disposition des ouvriers.

Vingt boulangers sont nécessaires à cette tâche et le rendement moyen est de 600 kilos en 16 heures.

Aussitôt cuits les pains sont chargés sur des camionnettes et expédiés sur les dépôts de vente.

LES CONSEQUENCES D’UNE HEUREUSE INITIATIVE

Toute cette organisation a été étudiée avec le plus grand soin ; c’est ainsi que le moulin actionné ordinairement par la force hydraulique sera muni d’un moteur électrique de secours de 50 CV, qu’alimenterait, en cas de besoin la société électrique de Poitiers ; l’usine a même été surélevée afin d’éviter l’envahissement des grandes eaux.

La conjonction de la minoterie et de la boulangerie ; les perfectionnements modernes dont est dotée la panification permettent de produire le pain à un prix réduit.

Il en résulte en effet une réduction considérable de temps, de main-d’œuvre qui se produit par une diminution de dépenses. Etant donné que 100 kilos de farine produisent 130 kilos de pain, l’économie est telle et le rendement si important que le bénéfice peut se limiter à l’excèdent de production, chose absolument impossible avec les procédés habituels de la boulangerie.

Cette économie dans la fabrication, ce sont naturellement les consommateurs qui seront appelés à en profiter puisqu’ils paieront le pain moins cher.

Mais les dépositaires – épiciers généralement – tireront également des avantages de cette situation. La vente du pain attirera la clientèle et l’expérience a déjà été faite que leur chiffre d’affaires générales augmentera de 50 % environ.

Bien entendu il ne saurait être question d’alimenter toute la ville, mais les faubourgs nord tout au moins pourront être approvisionnés.

Les travaux sont poussés activement et M. Gérard Hambis a tenu à ne traiter qu’avec les seules entreprises de Poitiers ; dans ces conditions on peut espérer que l’usine sera mise en marche au mois de septembre.

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le 29/05/2020 à 18:21

Source : L'Avenir de la Vienne

boulanger, patron, usine

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