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1598111/10/1995POITIERS

GRÈVE DES FONCTIONNAIRES – PRÈS DE 10.000 POITEVINS DANS LA RUE

La plus grosse manif manif de salariés depuis 1968. Entre 7.000 et 10.000 manifestants ont arpenté le pavé poitevin pour dénoncer le gel des salaires

De mémoire de syndicaliste poitevin, jamais depuis mai 1968, une manifestation de salariés de la fonction publique n’avait obtenu l’ampleur de celle qui s’est déroulée, hier après-midi, dans les rues de Poitiers. « Nous sommes près de 10.000 », hurlait, ravi, à la fin de la manifestation, un syndicaliste de FO. Un chiffre tempéré cependant par les estimations des renseignements généraux qui évaluaient, eux, à 7.000 le nombre de manifestants (1) à avoir arpenté le pavé de la capitale régionale à l’appel des six organisations syndicales (CFDT, CFTC, CGT, FO, FSU, UNSA) unies pour la première fois depuis 1986. Un appel unitaire relayé par de nombreuses autres organisations.

Dès 13 heures, les premiers manifestants ont afflué dans le parc Blossac, lieu de départ du cortège. Sous un soleil estival, la sono de la CGT diffuse des airs de Jean Ferrat. Plus loin, celle de FO préfère la variété française. Les militants des centrales syndicales distribuent à volonté, autocollants, tracts, affichettes aux grévistes qui ne cessent d’affluer dans le parc. Les délégations se mettent en place. 14 h 45, le cortège de tête démarre enfin. Une heure plus tard, le dernier manifestant peut enfin commencer à défiler.

Une forêt de drapeaux

La banderole de tête, symboliquement portée par un membre des six centrales syndicales, rappelle les motifs de la grève : « Pour une fonction publique au service de tous. Statuts, emplois, salaires, retraites ». Derrière, pour ménager toutes les susceptibilités, les organisations défilent par ordre alphabétique.

Les lunettes de soleil, les bermudas, les chemisettes à fleurs constellées d’autocollants côtoient les uniformes des pompiers, des postiers et les blouses blanches des infirmières. Une forêt de drapeaux frappés de sigles syndicaux flotte. Sifflets, fumigènes, pétards, cornes de brumes, mégaphones, tambours, les manifestants les plus jeunes s’en donnent à cœur joie. Les anciens sont plus discrets. Un autocollant de la CGT sur la chemise, Guy Renaud, 59 ans, retraité de la SNCF n’a cessé de défiler depuis 1963, date de son adhésion au syndicat. A la retraite, il assure « qu’il faut se battre pour les jeunes. Tant que je pourrais marcher, je manifesterai ». Au milieu des manifestants, plusieurs adjoints au maire, MM. Blusseau, Gaboreau, Bodin, Royer, commentent les chiffres.

« Le premier avertissement »

A 16 heures, le cortège, qui a fait le tour de la place d’Armes, se retrouve devant la préfecture. Quelques minutes plus tard, la place Aristide-Briand n’est pas assez grande pour contenir tous les manifestants. Le jet d’eau s'arrête. Hissé sur un fourgon tapissé d’affiches, le jeune syndicaliste Hervé Rochais prononce au nom des six syndicats le discours final.

« C’est un premier avertissement que le gouvernement devra prendre en compte car la mobilisation unitaire ne sera pas éphémère si nos revendications ne sont pas prises en compte ».

Il est 16 h 40, la grande manifestation des salariés se disloque dans le calme. Les grévistes ont le sourire, les responsables syndicaux sont plus circonspects. Ils n’ont pas souhaité être reçu par le préfet et réfléchissent déjà à la meilleure manière de gérer leur « victoire pour ne pas qu’elle se transforme en victoire à la Pyrrhus ».

Jean-Jacques Allevi

(1) 4.500 manifestants ont défilé à Angoulême, 4.500 également à La Rochelle et 3.000 à Niort.

Un bataillon de slogans

Revue détaillée des slogans les plus lus et entendus :
« Juppé t’es foutu, les fonctionnaires sont dans la rue », « Puech, de la fraîche, ou retourne à la pêche », « Chirac pas d’arnaque, Juppettes des pépettes », « Chirac Picsou, pique pas nos sous », « Fonctionnaires en colère pas seulement pour les salaires »...

La grève en pourcentage

 

Voici, secteur par secteur, les pourcentages de grévistes dans le département et dans la région Poitou-Charentes. Dans le département, ce sont les services du Trésor public qui arrivent en tête avec près de 80 % de grévistes alors que plus de la moitié des salariés de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) n’ont pas suivi le mouvement.
- EDF-GDF : 75 % de grévistes dans la Vienne.
- France Télécom : 70 % de grévistes dans la Vienne, 74,1 % dans la région.
- Enseignement : 90 % de grévistes dans le premier degré, 80 % dans les collèges et dans les lycées, 50 % à l’université. Dans l’académie, il y a eu près 85 % de grévistes dans le primaire et 72 % dans le secondaire.
- SNCF : chez les conducteurs, la grève a été suivie à 93 % à Poitiers. Un TGV sur cinq a circulé. En revanche, aucun train grandes lignes et aucun train régional n’a quitté les dépôts. 70 % de grévistes dans la région.
- Finances et Trésor public : de 75 à 80 % de grévistes dans le département.
- Collectivités territoriales : de 50 à 60 % de grévistes.
- La Poste : 51,66 % de grévistes dans le département et 60 % en région Poitou-Charentes.
- Caisse primaire d’assurance maladie : 49,18 % de grévistes.

Photo : Les manifestants ont envahi les rues de Poitiers

 

 

le 12/05/2025 à 18:22

Source : La Nouvelle République du Centre Ouest

grève, manifestation, unité, participation

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