1616927/01/1996LUSIGNAN
… ou comment une entreprise en pleine santé connaît des problèmes de trésorerie après attentats et grèves. Heureusement, emplois et activité sont préservés.
C’est le tribunal de commerce de Paris qui, au cours de son audience du jeudi 25 janvier, a prononcé ce jugement de mise en redressement judiciaire à l’encontre de la société Amor. Comme on peut facilement l’imaginer, la nouvelle a jeté un trouble à Paris dans les milieux de la mode où l’entreprise fait référence et possède son siège (cinquante-huit personnes), mais aussi à Châtellerault où l’usine Amor emploie cent cinquante-deux salariés. Étonnement aussi dans la mesure où Amor SA a connu depuis sa création en 1986, un développement très important, passant d’un capital de 50.000 F à 21 millions de francs et d’un chiffre d’affaires de 20 MF à plus de 100 MF aujourd’hui, dont 75 % à l’exportation !
Développement exemplaire donc, mais aussi fragilisation d’une trésorerie en raison d’investissement couteux rendus nécessaires par l’effondrement du marché de la mode en 1993. « A cette époque-là, explique Nagib Amor, directeur de l’usine châtelleraudaise, il nous fallait investir pour franchiser et trouver de nouveaux clients ». Ainsi la marque Plein Sud (une des plus belles réussites de la société) a-t-elle donné lieu à la création d’une boutique, rue des Francs-Bourgeois, à Paris, en 1993. Aussitôt le succès a répondu présent et Amor SA a franchisé des magasins à Tel-Aviv, Taïwan, Hong-Kong, Djeddah, Madrid et dernièrement à Saint-Tropez. « Ces franchises nous ont permis de sauver notre tête au cours des derniers mois », note Nagib Amor qui donne des chiffres précis : « Taiwan est, par exemple, passé de 500.000 F de chiffre d'affaires à 5 millions de francs ».
Un plan de six mois
Reste que ces investissements ont été coûteux pour cette société dont l’activité reste très asservie au contexte et à l’air du temps. Et de ce côté-là, Amor paye au prix fort les événements de la rentrée. Explications : « En raison des attentats, beaucoup de nos clients étrangers ne sont pas venus au salon de septembre et n’ont donc pas passé commande. Novembre a été logiquement plat, mais les grèves de décembre ont été la cerise sur le gâteau, puisque toutes nos matières premières et fournitures ont été bloquées chez les transporteurs. Nous avons donc été dans l’incapacité de livrer nos clients à temps, d’où un énorme manque a gagner ».
Ces deux éléments, ajoutés à une certaine défiance de la part des banquiers, ont donc mis à mal une trésorerie déjà fragilisée. Tout ceci a donc conduit les frères Amor à déposer le bilan, puis a étudier une autre procédure en obtenant ce redressement judiciaire qui s’assortit d’un plan de six mois, renouvelable : « Ceci nous permet de préserver l’ensemble des emplois sur les deux sites ainsi que l’activité. On fera de nouveau le point sur la situation dans six mois ». Cette situation devrait, d’après les premières indications, s’améliorer très nettement. Sauf bien sûr si d’ici là, le contexte économique et social hexagonal se détériore encore... A suivre !
Jean-Philippe Bois
le 01/06/2025 à 17:30
Source : La Nouvelle République du Centre Ouest
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