1641718/10/1996POITIERS
Plusieurs milliers de manifestants ont défilé hier à Poitiers pour défendre la cause du service public. Avec force banderoles, musiques et slogans.
Selon une tradition maintenant bien établie, la police et les syndicats ne sont pas d’accord quant au nombre de manifestants qui ont défilé hier dans le centre-ville de Poitiers (2.700 selon les premiers, près de 10.000 d’après les seconds). Tout le monde reconnaît pourtant que la mobilisation était grande. Ce qui traduit un évident mécontentement des agents de la fonction publique participant à ce premier grand rendez-vous revendicatif de la rentrée 96. Pour notre part nous nous sommes essayés au petit jeu du comptage et nous sommes arrivés au chiffre vague de six à huit mille personnes.
Une certitude dans cette bataille de chiffres : il y avait beaucoup, beaucoup de monde dans le cortège parti vers 10 h 30 du parc Blossac, pour arriver aux alentours de midi devant la préfecture, après avoir sillonné tout le centre-ville. « C’est vrai qu’il y a du peuple, mais peut-être moins que lors des manifs de décembre », faisait remarquer un passant à un organisateur qui lui rétorquait aussi sec : « Exact, mais on n’est qu'en octobre et c’est pas fini ». Une réplique qui donne le ton et laisse augurer de la détermination des syndicats à poursuivre leur action dans les mois qui viennent.
Manif unitaire
En tête du cortège, un calicot unitaire CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO, FSU, UNSA et, derrière, un florilège de ces banderoles pleines de couleurs qui sont à une manifestation ce que le beurre est à la tartine : indispensables, quoi qu’en disent certains esprits chagrins. En plus, sous peine de perdre de sa spécificité, une manif a son folklore historique. Celle de Poitiers, favorisée par un beau soleil, n’a pas failli à la tradition. Banderoles bien sûr, mais aussi distribution de tracts, petits panneaux revendicatifs, musique de Jean Ferrat du côté de l’estafette cégétiste, bidon tambour chez FO, trompes un peu partout, autocollants sur la tronche ou sur la veste et déguisements professionnels. Pour la journée d’hier, le prix de la mise en scène reviendra à la délégation CGT de l’hôpital de Châtellerault. Elle roulait sur une civière un militant, qui a vécu ainsi sa première manifestation couchée.
Devant la préfecture, au nom de l’intersyndicale, Bernard Viot a pris la parole pour se féliciter de la participation, avant de rappeler les raisons qui avaient justifié la descente des fonctionnaires dans la rue : arrêt immédiat des suppressions d’emplois programmées par le gouvernement au sein du service public ; la revalorisation immédiate des salaires, des pensions, dans le cadre de la négociation contractuelle ; l’arrêt immédiat de la précarisation des conditions d'emploi. Et de rebondir, en entrée, sur les difficultés de la rentrée : « Mais quelle rentrée, avec près de sept millions de demandeurs d’emploi. Hier de multiples secteurs professionnels d’origines diverses ont été sacrifiés au nom de l’économie... ». Petit couplet, en plat de résistance, contre les dispositions européennes : « Dans notre pays, les services publics ont fait la preuve de leur efficacité sociale, économique et sont un gage de cohésion. En Europe, les privatisations se sont traduites par moins d’égalité et de solidarité. Et pas davantage de services hospitaliers, de gares, d’écoles de guichets.
En dessert, coup d’œil sur les travaux de la Cour des comptes qui ont révélé la dérive des contrats emplois solidarité : « Les CES se sont considérablement développés ces dernières années, notamment dans l’éducation et la santé. Par ailleurs, la Cour des comptes constate et déplore que l’interdiction des CES dans les services de l’État ait été détournée, parfois sur un encouragement express de l’administration. Oui, disons-le tout net : des centaines de milliers d’emplois stables pourraient être créés dans les services publics ».
Applaudissements. Les banderoles se replient et la manifestation se disloque par petits groupes. On se dit au revoir « Salut à la prochaine ». Manif s’entend.
Jacques Furlan
Photo : 10.000 personnes selon les organisateurs, 2.700 selon la police
le 01/07/2025 à 14:00
Source : La Nouvelle République du Centre Ouest
grève, manifestation, unité, participation, emploi, précarité
Espace Militants v0.3 - UD CGT 86 - http://cgt-ud86.org