0264201/02/1945POITIERS
Pendant quatre ans des journaux, des affiches, des discours bourrés de lyrisme ont ressassé à perdre haleine, le thème de la jeunesse, de notre jeunesse avide de servir et de bâtir. Magnifiée comme l’espérance de notre pays, la jeunesse se voyait devenir et de plus en plus étroitement, l’instrument d’une politique.
Au moment où il s’agit de construire une France nouvelle et virile, il importe que la question de la jeunesse soit reconsidérée dans toute son ampleur. Et, pour la première fois depuis cinq ans, des jeunes ont pris librement la parole mardi soir au Comœdia pour montrer, en même temps que les aspirations légitimes de la jeune classe ouvrière, les souffrances du passé et du présent, l’angoisse de l’avenir. Christine Aguerre de la J.O.C.F. (Jeunesse Ouvrière Chrétienne Féminine), Jean Benoit de la J.O.C. et Pierre Boucault du Mouvement Populaire des Familles (M.P.F.), tout à tour entretinrent leur nombreux auditoire du programme qu’il va falloir entreprendre pour la complète libération ouvrière. Programme où pourra se manifester l’originalité de l’esprit français et nous reprenons cette phrase : « Notre peuple retrouve son génie dans la diversité, nous ne voulons pas du Français-standard ».
« Nous sommes des révolutionnaires. Nous voulons un autre style de vie que celui de nos ainés », disait Jean Benoit. Et l’orateur d’exposer qu’une jeunesse noble, vigoureuse, est fonction de conditions de vie favorables à un épanouissement tant physique que moral et intellectuel. Le problème de la jeunesse n’est pas l’embrigadement « la caporalisation vichyssoise ». C’est d’abord l’amélioration du milieu où la jeunesse vit : lieux de travail, école, loisirs, maison familiale. C’est un problème social dont la primordialité est incontestable quand on analyse l’ensemble du problème.
Et nous approuvons pleinement les orateurs. Car la Révolution qui nous fut exposée, d’essence chrétienne, n’a de chance d’aboutir qu’en modifiant les conditions de vie des hommes trop souvent opprimés par un totalitarisme ou un capitalisme cynique et en bouleversant les rapports économiques et sociaux. Après quoi il sera plus facile de changer les hommes eux-mêmes quand une vie plus stable, plus juste, en un mot plus digne, leur donnera les moyens de développer leur vie spirituelle. Prendre le problème à l’envers, comme ce fut trop souvent le cas, c’est-à-dire poser les problèmes de la vie spirituelle en premier lieu, c’est aller à l’échec et les mouvements de jeunesse J.O.C. l’ont très bien compris.
…/…
« Pour la reconstruction les travailleurs répondent présents », affirma aux applaudissements de la salle, Pierre Boucault, « Présents, continue-t-il avec nos bras, notre intelligence, notre volonté, pour que de cette guerre sorte enfin un ordre social meilleur ». Le problème de la maison ouvrière « idée centrale de la dignité ouvrière » fut évoqué, ainsi que l’épuration qui doit s’appliquer non seulement aux hommes politiques mais aux spéculateurs de la misère ouvrière, entre autres « à ces patrons recherchant des systèmes de salaires crève-la-faim ».
Mais l’établissement de conditions favorables à la formation de la personnalité ne fut pas le seul point envisagé ! L’éducation concrète – facilitée par le climat social créé – doit se situer après l’école, dans des mouvements de jeunes (les orateurs estimèrent que la pluralité des mouvements est nécessaire). Une motion résumant les buts de la J.O.C. et du M.P.F. fut ensuite votée et transmise à M. le Commissaire de la République.
le 07/11/2020 à 14:55
Source : Le Libre Poitou
Espace Militants v0.3 - UD CGT 86 - http://cgt-ud86.org