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0298002/05/1947POITIERS

1ER MAI FÊTE DE LA CLASSE LABORIEUSE, JOURNÉE DE REVENDICATIONS

Union, Vigilance, sont les mots d’ordre lancés par les dirigeants de la CGT

Avec un peu d’avance les saints de glace ont montré le bout de leur nez transi, si bien que la fête du 1er mai s’est déroulée par un temps frais et sous un ciel sale.

1er mai, fête des masses laborieuses, journée de revendications marquée dans tous les pays libres et démocratiques par des manifestations qui toujours revêtent une certaine ampleur.

Cette année, la CGT avait décidé de donner au 1er mai un caractère encore plus accentué qu’à l’ordinaire pour montrer le déploiement d’une force tranquille et parfaitement organisée qu’elle n’entend pas être détournée de son but : la personnalité et l’indépendance de la France dans un régime de liberté et débarrassée de la tutelle des trusts.

Le meeting de Poitiers

Les manifestations débutèrent mercredi soir. L’Harmonie municipale donna un concert sur la place d’armes.

Jeudi matin, comme à l’accoutumée, on procéda au pointage des cartes syndicales à la Bourse du Travail.

L’après-midi, l’Union locale avait convié ses adhérents à un important meeting qui se déroula dans le parc de Blossac, sous la présidence de M. Vigier, secrétaire-adjoint de l’UD. A la tribune avaient pris place Mmes Malderieu, conseiller municipal et Vergez, secrétaire générale de l’UFF ; MM. Guillon, maire de Poitiers, représentant le groupement des résistants et radicaux de gauche ; Maillocheau, député ; Bouloux, conseiller de la République, du parti communiste ; Vélisson de la SFIO, Sopesen des travailleurs espagnols, Périllaud de l’URFF, Albert des jeunesses SFIO et un représentant du F.N. ; M. Doutre, délégué de la CGT, secrétaire fédéral, remplaçait M. Hamon, récemment opéré.

Les discours

C’est M. Vigier qui inaugure la série des discours et qui rappelle en quelques mots le caractère revendicatif de cette journée et le rôle que la classe ouvrière a joué dans la libération économique à réaliser après la libération du pays.

M. Vélisson qui lui succède très justement fera le point des tâches à remplir par les travailleurs et démontre les dangers qu’elle encourt devant toute tentative de pouvoir personnel.

« Tous unis nous gagnerons une nouvelle bataille pour la République et la Paix » conclut-il.

Fort judicieusement les représentants de jeunesse avaient été appelés à participer à ce meeting et les discours de MM. Périllaud et Albert ont à coup sûr revêtus un intérêt soutenu. N’avait-on pas pris l’habitude de constater que la question des jeunes était trop longtemps en suspend au sein même de la CGT. Et pourtant leur action fut féconde, leurs pensées sont mûries, leurs projets dans le domaine social hardis et pour obtenir l’exécution ils demeurent jusqu’à ce que solution s’en suive sur le plan purement revendicatif.

Avec Mme Vergez c’est l’espoir de voir « la Paix et la démocratie défendues par le monde du travail. Mais nous savons, poursuit-elle, quelles menaces pèsent sur les principes que nous défendons ».

Sa conclusion sera un vibrant appel aux femmes en les exhortant à la vigilance : « Il faut, dit-elle, que les femmes ne perdent pas de vue que la lutte n’est pas finie ».

Pour bien montrer l’union étroite qui régit le monde ouvrier, les dirigeants de l’UD avaient invité un représentant des travailleurs espagnols en exil. Geste symbolique. L’Espagne ploie encore sous la brutale terreur franquiste. Mais la classe laborieuse, malgré les coupes sombres faites dans ses rangs, malgré les bagnes et la prison, combat quotidiennement pour sa libération : M. Sopesen en apporte l’émouvant témoignage.

C’est au tour de M. Bouloux d’apporter au nombreux auditoire, des précisions sur les graves problèmes intérieurs et extérieurs qui inquiètent le monde ouvrier. Devant ces problèmes et devant les tentatives de pouvoir personnel, le représentant du parti communiste lance un appel en faveur des comités de vigilance et du regroupement encore plus efficace au sein de la CGT.

M. Doutre

Avant le discours de M. Doute la « Marseillaise » retentit.

Le délégué fédéral brosse une brève rétrospective des luttes menées par la CGT dès sa création et durant l’occupation. Son journal clandestin appelait les travailleurs à l’union contre Vichy, au refus du travail pour l’Allemagne, à la participation pour la lutte armée.

La chute du fascisme permettait d’espérer l’établissement d’une République saine et forte, l’application du programme unanimement approuvé du CNR. En 1945, les aspirations des travailleurs demeuraient intactes, ce fut un 1er mai d’allégresse. En 1946 des symptômes d’effritement s’estompent et pourtant 1.500.000 ouvriers défilent à Paris.

En 1947, la réaction guidée par les trusts, s’affirme. On assiste à une ébauche de pouvoir personnel. Les travailleurs doivent se montrer vigilants. « Nous avons des gages, poursuit M. Doutre, mais notre union pour pouvoir continuer le travail par un regroupement indispensable est nécessaire. Union. Vigilance ».

La résolution

L’« Internationale » retentit et M. Vigier lit le texte de la résolution ci-dessous adoptée à l’unanimité :
« Les travailleurs de toutes professions, les fonctionnaires, agents des services publics et consommateurs de Poitiers, réunis le 1er mai 1947 à l’appel de l’Union locale des syndicats ouvriers et des organisations démocratiques, après avoir entendu l’exposé du camarade Doutre, délégué de la CGT, affirment leur décision de rester unis pour obtenir l’amélioration des conditions de d’existence de ceux qui concourent au redressement économique de la nation, pillée par quatre années d’occupation.
« En matière revendicative, ils réclament avec force que soit enfin solutionnée la question du salaire minimal vital en respectant la hiérarchie des salaires, indispensable à l’augmentation de la production.
« Tenant compte du salaire minimum vital, ils réclament que le plafond de l’impôt sur les salaires soit porté à 84.000 fr, par an, chiffre en dessous duquel il n’est pas possible de vivre dignement du fruit de son travail.
« En matière de baisse des prix, ils réclament que des mesures énergiques soient enfin prises pour que les décisions gouvernementales soient appliquées dans le sens des intérêts de la nation.
Ils réclament également la confiscation des stocks illicites, le châtiment impitoyable des trafiquants du marché noir et des fraudeurs et l’institution d’un coefficient maximum de majoration des prix par rapport à 1938, mesure permettant la révision des prix ayant subi des hausses abusives.
« Ils demandent la suppression des intermédiaires inutiles et la mise au travail de tous les oisifs de 18 à 55 ans.
« Pour réaliser la paix sociale, indispensable au redressement économique de la nation, ils réclament la discussion immédiate des conventions collectives nationales.
« En ce jour du 1er mai 1947, ils saluent les peuples épris de liberté, en lutte pour le respect de leur indépendance.
« Ils s’élèvent contre les tentatives du pouvoir personnel et appellent tous les républicains à s’unir dans les comités de vigilance pour faire le barrage contre les menées anti-démocratiques visant au renversement de la République.
« Vive l’Union de tous les Républicains.
« Vive l’Union des syndicats ouvriers de la Vienne.
« Vive la Confédération Générale du Travail.
« Vive la Fédération Syndicale Internationale.
« Vive la République.
« Vive la France.

Place de la Liberté

A l’issue du meeting un cortège emmené aux gais accents de la clique de France-Liberté, se rendit place de la Liberté où, devant la statue. M. Vigier remercia tous ceux qui participèrent aux manifestations organisées par la CGT.

 

 

le 19/11/2020 à 17:30

Source : Le Libre Poitou

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