0302604/09/1947POITIERS
Une protestation de l’Union des syndicats
Nous recevons de l’Union des syndicats de la Vienne, sous le titre : « Pour intensifier l’augmentation de la production, pour maintenir la paix sociale indispensable au redressement national : application des accords CGT – CNPF », la communication suivante :
Depuis le 16 juillet 1947, les deux grandes organisations, la CGT et le CNPF, ont signé un accord comportant un relèvement des salaires à compter du 1er juillet 1947.
Cet accord donnait satisfaction à l’ensemble des travailleurs, ouvriers, cadres, techniciens. Il prévoyait une augmentation des salaires de 11 % tout en respectant le minimum vital 42 fr 50 pour la région parisienne, sans que pour cela les prix subissent de hausse générale. Il respectait également la hiérarchie des salaires.
Aux termes de l’accord il y avait possibilité de réviser les prix tout en maintenant leur niveau général, par l’augmentation de certains prix anormalement bas et en contrepartie de diminution de ceux trop élevés.
L’augmentation des salaires résultant de cet accord s’appliquait sur les salaires réels et de ce fait tenait compte des avantages arrachés par la classe ouvrière et en particulier les primes à la production.
L’application de cet accord apportait la paix sociale indispensable au redressement économique. Mais M. Ramadier, président du Conseil et ministre du Ravitaillement ne l’entendait pas ainsi. Il est vrai que la ratification des accords CGT-CNPF était un désaveu de la politique gouvernementale en matière de salaires et de prix.
C’était la condamnation pure et simple du « cercle vicieux » sur lequel s’est appuyé le gouvernement pour refuser d’améliorer le sort de ceux qui produisent.
En fait, le prétexte invoqué était le suivant : l’augmentation des salaires allait entraîner une augmentation des prix.
Nous considérons que l’argumentation du gouvernement repose sur un château de cartes ; car avant d’accorder l’augmentation des salaires il a pris le soin de déclencher une vague de hausses.
Monsieur de Menthon n’est plus à l’Économie nationale mais sa politique de hausse continue.
Les arrêtés se succèdent sans désemparer, à la grande joie des spéculateurs et des représentants des trusts.
L’indice des prix de détails était de 935 au mois de juin 1947 contre 532 au mois correspondant de 1946 avant l’augmentation des salaires de 25 % (1er juillet 1946).
Quatre mois après cette augmentation l’indice atteignait 856, soit 66 % d’augmentation du coût de la vie contre 25 % sur les salaires.
Au mois de juin 1947, l’indice était à 935, en juillet 965 et au mois d’août la statistique officielle annonce 1.068. Depuis l’augmentation des salaires de 25 % la vie a donc augmenté de plus de 100 %. Que vient donc faire dans cette galère le « cercle vicieux des salaires et des prix », triste politique au service des trusts. Où se trouve le chef d’orchestre clandestin ? Nous pensons plutôt que le glissement à droite se fait au grand jour au mépris de l’intérêt national.
Tout au contraire l’accord CGT-CNPF s’appuie sur la réalité. Il apporte la paix sociale par l’accord entre les ouvriers et les patrons qui ne voient pas sans crainte la politique française glisser dans l’orbite des États-Unis.
Cette politique conduit au relèvement de l’industrie allemande avant celle de la France, à la suppression du charbon de la Ruhr, à l’augmentation du prix du pain et à la diminution à 200 gr, bientôt 150, du taux de la ration.
Mauvais pain et pain cher
Voilà ce que constate la majorité des français.
Et bien c’en est assez, le peuple qui travaille, qui produit, qui relève la France après l’avoir délivré de l’envahisseur hitlérien, ne veut plus de cette politique.
Il veut une politique française s’appuyant sur la démocratie et l’intérêt national. Il saura faire entendre sa voix, il montrera le chemin aux naufrageurs du franc. Le chemin du pain, de la paix et de la liberté.
Pour sa puissance et son unité, contre les hommes des trusts, contre les saboteurs du redressement national, il faut respecter les accords CGT-CNPF.
L’avenir de la République sera sauvé contre ceux qui rêvent de confier la France à l’homme du micro de la radio de Londres.
J.L. Vigier, secrétaire général de l’Union des syndicats ouvriers de la Vienne
le 24/11/2020 à 11:05
Source : Le Libre Poitou
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