0313220/12/1947POITIERS
Voici la lettre de démission adressée par M. Vigier, secrétaire de la Bourse du Travail, à M. le Préfet de la Vienne :
« Monsieur le Préfet,
Au cours de la réunion commune du 25 novembre 1947, de la Commission départementale de surveillance des prix et de la Commission consultative départementale du Ravitaillement et du Comité départemental des prix, j’ai cru de mon devoir de démissionner de ces organismes.
Au cours de mes explications, je vous ai indiqué, Monsieur le Préfet qu’il ne m’était plus possible, en tant que représentant des organismes ouvriers, de continuer à ratifier des prix en hausse constante depuis la création de ces commissions.
Je vous ai indiqué, pour argumenter ma thèse, que l’indice des prix était passé de 532 au mois de juin 1946, à 1.268 au mois d’octobre pendant que les salaires ne subissaient que 25 % d’augmentation au mois de juillet 46 et 11 % au mois de juillet 47.
D’autre part, j’indiquais que cette situation découlait à mon avis de la politique gouvernementale en matière économique qui dans beaucoup de circonstances provoquait lui-même la hausse par des arrêtés ministériels.
Pour le problème de la viande en particulier, les plans succédaient aux plans sans pour cela voir une amélioration quelconque, au contraire la situation s’aggravait à chaque changement.
J’ai également indiqué le travail réalisé par nos organisations syndicales en matière d’assainissement des marchés et les difficultés dans lesquelles nous nous étions trouvés lorsqu’elles ont été officialisées par l’arrêté ministériel en date du 9 janvier 1947 (Journal Officiel du 10).
Cet arrêté prévoyait notamment à l’article 6 :
« Certains membres des Commissions d’assainissement pourront être commissionnés pour établir des constats relatant les résultats de leurs investigations effectuées dans le cadre des « articles 4 et 5 ci-dessus ».
La Commission d’assainissement des prix de la ville de Poitiers s’est réunie deux fois ; la première pour déterminer son travail ; la deuxième pour désigner les magasins témoins.
Au cours de cette dernière réunion, la Commission unanime en application de l’article 6 cité ci-dessus, vous avez demandé de commissionner certains de ses membres pour effectuer le travail prévu.
Or, depuis cette date, le silence complet sur cette affaire, ce qui n’empêchait pas les prix de monter.
Ce sont les raisons pour lesquelles j’ai cru me retirer de ces Commissions pour ne pas me faire le complice de la hausse continuelle des prix au grand détriment des travailleurs qui voyaient leur pouvoir d’achat diminuer chaque jour.
J’ai toutefois précisé que je ne faisais en rien porter la responsabilité aux membres de ces Commissions avec qui j’avais collaboré.
J’ai donc l’honneur, Monsieur le Préfet, de vous confirmer ma démission verbale sûr de défendre ainsi les intérêts de ses adhérents.
En m’excusant de cette position qui n’est pas dirigée contre le travail de vos services, je vous prie de croire, M. le Préfet, à l’expression de ma haute considération.
Le secrétaire général, L. Vigier
le 26/11/2020 à 15:50
Source : Le Libre Poitou
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