« Retour

0325403/05/1948POITIERS

LE 1ER MAI — LA CGT A BLOSSAC

Malgré le temps incertain de nombreux travailleurs avaient répondu samedi après-midi à l’appel de la CGT et s’étaient rendus sous les vertes frondaisons de Blossac.

Signalons que durant toute la manifestation, parfaitement calme et bien organisée, si le vent souffla en rafales, la pluie qui tout le jour tomba par intermittence, avait daigné s’arrêter.

C’est dans l’allée centrale, à son début, que furent prononcés des différents discours.

Entourant M. Vigier, secrétaire général de l’UD, on remarqua le bureau de l’UD, M. Revardot, délégué du Comité central, Bouloux du parti communiste, les délégations de l’UFF, des Vieux Travailleurs, des FTPF.

Le premier M. Vigier prend la parole pour rappeler ce qu’est la Fête du 1er mai, lancer un appel de tous les syndicalistes au sein de la CGT, fustiger les fauteurs de guerre, les capitalistes et la réaction.

Le discours de M. Revardot

Une demi heure durant, le délégué de Paris, secrétaire de la Fédération des Travailleurs de l’État, prononça un discours à la documentation fournie.

Lui aussi, au début, il rappellera ce qu’est le 1er mai, « journée universelle, journée revendicative internationale ».

Il retrace brièvement l’historique de la Fête des Travailleurs, pour arriver au 1er mai 1948.

C’est alors, pour l’orateur, l’occasion de s’arrêter longuement sur la politique gouvernementale actuelle et de préciser sa pensée :
M. Schuman est venu à Poitiers. Vous a-t-il parlé de la faillite de son Gouvernement ? Vous a-t-il dit que les indices officiels par rapport à 1938 ont monté 15 fois et les salaires 8 fois ?

C’est systématiquement le procès de la 3ème force « qui a fait faillite, tandis que les profits capitalistes augmentent ».

Second point de mécontentement : le chômage, « chômage dans les constructions aéronautiques, dans les cuirs et peaux, chômage qui vient aggraver le commerce ».

M. Revardot est amené à parler du plan Marshall. « La France, poursuit-il, est dans une situation difficile, mais, sachez que les crédits américains sont nettement insuffisants ».

Tout cela, selon l’orateur, se traduira par « l’investissement des capitaux étrangers dans les entreprises françaises, qui placera la France sous la tutelle des capitalistes américains.

« Toute la politique gouvernementale, poursuit M. Revardot, est la conséquence du plan Mayer, qui a ruiné le franc. Les travailleurs n’ont rien à attendre du marché libre de l’or », alors que parallèlement « C’est l’Amérique qui nous refuse le charbon de la Ruhr, qui en renfloue l’industrie, qui veut liquider les réparations auxquelles nous devons prétendre et qui partout installe des gouvernements à sa dévotion ».

La psychose de guerre, soigneusement entretenue depuis quelques temps est ensuite abordée par M. Revardot. « Il faut réagir contre l’impérialisme capitaliste ». Il lance alors un appel aux mères de famille pour soutenir ceux qui luttent contre la guerre, et la CGT « qui ne peut et ne doit pas rester indifférente ».

Quelques mots sur le « danger gaulliste et ses menaces ».

Ce sera, devant toutes les menaces qui pèsent sur le monde du travail, l’occasion pour l’orateur de déplorer la scission. « Cette brèche, dit-il, si elle n’était pas comblée risquerait de réduire les conquêtes sociales ».

En conclusion, le secrétaire de la Fédération des Travailleurs de l’État, présente rapidement le plan d’action de la CGT :
- Minimum vital à 12.900 fr. - Hiérarchie des salaires. - Baisse des prix en réduisant les profits capitalistes. - Révision des zones d’abattement. - Création d’un fond de chômage. - Défense des libertés démocratiques. - Union de tous les travailleurs. - Barrage contre le fascisme, contre les fauteurs de guerre.

M. Vigier remercie l’orateur et une résolution dont nous donnons l’essentiel plus loin est adoptée à l’unanimité.

Un cortège se forme alors ayant en tête les délégations déjà citées et leurs drapeaux pour se rendre place de la Liberté. Une gerbe sera déposée au pied de la statue.

La Résolution

Voici les passages essentiels de la résolution adoptée par les militants cégétistes.

« Les Républicains de Poitiers, réunis le 1er mai 1948, à l’appel de la CGT, affirment leur décision de rester vigilants contre les tentatives de division pour barrer la route à la réaction qui, encouragée par la complicité du gouvernement soi-disant républicain, applique les mots d’ordre de l’impérialisme américain, relève de plus en plus la tête.
« Ils tiennent fermement à condamner la politique réactionnaire et anti-sociale de ce gouvernement.
« Ils s’élèvent contre la position d’abandon des réparations dues par l’Allemagne.
« Ils demandent l’application des mesures sérieuses pour mettre un frein à la hausse désordonnée des prix, pour une réalisation réelle de la baisse.
« Ils protestent contre les entraves mises au fonctionnement des Comités d’entreprises.
« Ils s’élèvent contre les dernières décisions financières du gouvernement.
« Ils demandent également la convocation rapide de la Commission départementale de révision des zones d’abattement des salaires.
« Considérant que la paix sociale est indispensable à la reprise rapide du commerce et de l’industrie, ils demandent que les travaux des Commissions soient activement poussés.
« Ils protestent une nouvelle fois contre les lois scélérates.
« Ils réclament l’amnistie complète à l’égard des sanctionnés des grandes grèves.
« Ils protestent contre le cynisme des collaborateurs du Comité d’honneur pour la liberté de Pétain et les libérations scandaleuses des traitres qui avaient livré leur pays à l’étranger.
« Profondément attachés aux institutions républicaines, ils s’élèvent avec force contre les tentatives de pouvoir personnel du Général factieux De Gaulle.
« Ils appellent tous les démocrates sincères à renforcer leur unité.
« Tenant compte que la laïcité de l’école représente le bastion de la démocratie, ils s’engagent à œuvrer de toutes leurs forces pour la maintenir et la renforcer afin de donner une instruction républicaine aux enfants de la République.
« Ils tiennent à saluer l’URSS, les peuples grec et espagnol.
« Ils dénoncent avec force le plan Marshall, instrument de domination des trusts américains.
« Considérant que les dépenses exagérées inscrites au budget militaire amène la ruine de l’économie nationale, ils en demandent la diminution par la constitution d’une armée de conscription issue du peuple.
« Tenant compte de la nécessité impérieuse de réaliser l’unité de tous les Républicains, face aux menaces de la réaction, ils condamnent avec force la scission syndicale de « Force Ouvrière » et appellent tous les travailleurs à s’unir derrière le drapeau de la grande CGT.

 

 

le 30/11/2020 à 18:59

Source : Le Libre Poitou

meeting, résolution, motion

« Retour

Espace Militants v0.3 - UD CGT 86 - http://cgt-ud86.org

Site UD 86 - Espace militants - Espace formation