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0338120/11/1948POITIERS

M. BOTHEREAU SECRÉTAIRE FÉDÉRAL DE CGT-FO A PRIS LA PAROLE À LA MAISON DU PEUPLE

Vendredi soir, à 18 heures, l’Union locale des syndicats CGT Force Ouvrière conviait les travailleurs poitevins à assister, salle de la Maison du peuple, à un grand meeting au cours duquel devait parler M. Bothereau, secrétaire général de la CGT-FO. L’appel fut entendu car la salle pleine attendait l’orateur. Dans une salle voisine, la CGT avait convoqué le syndicat du Parc d’Artillerie et dès la fin de cette réunion, quelques membres de cet autre syndicat vinrent prendre place au meeting en compagnie de MM. Vigier et Périllaud, dirigeants de la CGT.

M. Roux, secrétaire de l’Union locale FO, ouvre la séance en remerciant M. Bothereau et en désignant, comme président, M. Souchaud, ancien secrétaire départemental de l’Union des syndicats et MM. Paulet, secrétaire de l’UD FO et Michaud des Cheminots.

Présentant l’orateur, M. Souchaud rappelle la vieille camaraderie et l’amitié qui le lient à M. Bothereau, venu pour situer la position de la CGT-FO par rapport au problèmes de l’heure. Le président de séance indique que ce meeting est la première manifestation publique depuis la réorganisation des Unions locale et départementale qui groupaient dès 1947 plus de 3.000 membres dans la Vienne et en arrive à définir FO : « Force Ouvrière, dit-il, est un mouvement qui s’inspire de la vieille tradition syndicale dans la liberté la plus absolue en dehors de toute idéologie politique, dans la justice et dans l’intérêt des travailleurs ».

Il passe la parole à M. Bothereau.

M. Bothereau

« Au lendemain de la Libération, déclare le secrétaire général de FO, un grand espoir guidait le mouvement ouvrier pour lui faire prendre pleinement ses responsabilités sur le plan économique. De nombreuses réalisations s’inscrivaient à l’actif du syndicalisme constructeur. C’étaient les Comités d’entreprise, un large secteur d’industries nationalisées, enfin le Conseil économique. Nous croyions que nous n’avions plus qu’à perfectionner ces réalisations, mais nous fûmes appelés brutalement à nous pencher sur d’autres problèmes, dont le plus important fut celui des salaires et des prix. Nous avons choisi les prix, car cette compression des prix était aussi vitale pour les travailleurs que pour les vieux, ces économiquement faibles, principales victimes de la hausse ».

La salle commence à être troublée par de fréquentes interventions des dirigeants de la CGT du Parc qui lancent de temps à autre quelques paroles outrageantes à l’égard de l’orateur, paroles qui sont plus ou moins bien prisées par l’assistance.

L’orateur n’en poursuit pas moins, après que le président de séance ait rappelé à l’ordre les perturbateurs.

« Grâce à FO, explique t-il, une campagne a été menée pour ne pas faire augmenter le prix du charbon. Nous avons gagné cette bataille ».

Puis M. Bothereau en arrive au déséquilibre existant entre les salaires et les prix : « Il faut que l’augmentation de 15 % accordée récemment ne soit pas « mangée » par de nouvelles augmentations et que l’augmentation envisagée à nouveau pour le charbon ne vienne pas se répercuter sur les produits manufacturés. Pour cela, une seule solution doit intervenir : la réduction des marges bénéficiaires de l’industriel au détaillant ».

M. Bothereau déplore maintenant l’accroissement de 500.000 commerçants nouveaux « dont l’utilité économique, dit-il, ne se justifie pas pour ces gens qui, hier, étaient dans le cycle de la production et sont passés aujourd’hui dans celui de la distribution, le négoce payant mieux ».

« J’ai l’impression maintenant, continue t-il, que je vais soulever dans cette salle quelques passions mais c’est nécessaire ».

Et le conférencier d’entretenir la salle, dans un brouhaha hostile de la part des membres de la CGT, des raisons qui ont motivé la scission au sein de la CGT en décembre 1947 et de l’examen du plan Marshall.

M. Bothereau termine : « Notre CGT-FO se porte extrêmement bien ; un certain nombre de réalisations sont à son actif. Mais nous avons quitté la CGT parce qu’elle avait sa liberté et son indépendance que les évènements de novembre et décembre 1947, réédités par les derniers, démontrent surabondamment. Il est des excès qui coûtent cher à des organisations syndicales, quant à nous, nous ne nous départirons pas de notre indépendance et de notre foi dans la défense du monde du travail ».

Des injures venant du noyau de la CGT se font entendre à nouveau, ce qui fait dire à M. Souchaud, après qu’il eut remercié l’orateur : « On ne convainc pas les gens par l’injure et la calomnie, nous avons l’habitude d’être polis, on est quelque peu navré d’entendre parler ainsi des militants qui se disent ouvriers ».

Des contradicteurs ayant été demandés, M. Périllaud, secrétaire de l’UJRF, monte à la tribune. Le contradicteur déclare être complètement en désaccord avec le conférencier et se plaint de la faiblesse de ses arguments. Il termine en parlant des milliards de francs donnés par Washington à FO.

C’est ensuite M. Vigier, secrétaire départemental de la CGT qui monte à la tribune, mais comme l’heure avance, M. Souchaud lui limite le temps après échange de paroles aigres-douces. M. Vigier n’en tient pas moins un bon moment la tribune s’attaquant violemment à FO, à M. Souchaud, à M. Commelin, aux problèmes de la Rhur, au plan Marshall, enfin au ministre de l’Intérieur, M. Jules Moch.

Il est 20 heures et M. Bothereau qui doit faire une conférence à 20 h. 30 à Châtellerault, répond rapidement aux points essentiels sur lesquels il a été interpellé.

A 20 h. 15, la salle s’évacue, non sans quelques altercations mettant aux prises ces auditeurs d’opinions différentes.

 

 

le 13/12/2020 à 18:59

Source : Le Libre Poitou

meeting, CGT, contradictoire

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