0351328/04/1935CHATELLERAULT
Le rapport moral
Camarades,
Notre Congrès se tiendra cette année à Chauvigny. Pour ceux qui ont conservé le souvenir de la vie syndicale clans notre département, Chauvigny leur rappellera, j'en suis sûr, le pénible souvenir d'un autre congrès de notre UD qui se tint dans cette petite ville, le 10 juillet 1921.
C'est en effet à ce Congrès de Chauvigny en 1921, que la scission syndicale se fit jour dans notre département.
Je ne voudrais pas revenir sur ce passé, car il est toujours pénible de rappeler ces douloureux moments de la vie syndicale. Je ne veux pas juger non plus. Sachons seulement que ces années de scission syndicale faillirent perdre à tout jamais notre organisation syndicale. Sachons aussi qu'au lendemain de 1921 notre U. D. fut sur le point de disparaître et qu'il fallut aux militants du moment un très grand courage pour remonter le courant et rassembler autour d'eux les militants et les organisations qui avaient pu résister à cette effroyable querelle qui dressait les uns contre les autres les ouvriers profondément divisés.
Dans son rapport moral de 1921, notre regretté camarade Audinet montrait la situation qui résultait de la scission. Le nombre des adhérents à l'U. D. qui était de 4.900 en 1920 passait à 16 ou 1.700 en 1921. La scission avait fait de terribles ravages dans nos rangs.
Depuis, la situation a été redressée, des syndicats disparus ont été reconstitués, dans bien des occasions notre organisation s’est affirmée et notre action a toujours été dirigée vers le regroupement de toutes les forces prolétariennes.
Le XXIIIe Congrès de Chauvigny, marquera une étape, celle de la reconstitution des syndicats ouvriers et de l’Union locale dans ce coin de la Vienne, où l'histoire syndicale est si riche d'exemples de la volonté ouvrière toujours dressée sur la brèche pour défendre ses libertés et son émancipation.
Certes, nous aurions tous désiré que ce Congrès fasse encore plus ; nous aurions désiré qu'il consacre la reconstitution de l'unité syndicale totalement refaite, nous regretterons qu'il n'en soit pas ainsi, mais nous devons convenir que nous n'en sommes nullement responsables.
Nos effectifs syndicaux
L'année dernière, au Congrès de Châtellerault. je pouvais annoncer avec joie, une augmentation très sensible de nos effectifs syndicaux. cette année, je crains de ne pouvoir faire de même.
En effet, si le nombre de nos syndicats a augmenté notre effectif en général a sensiblement diminué. Ceci résulte de causes qu'il est sans doute nécessaire d'expliquer.
Le nombre de nos syndicats a augmenté du fait de la constitution de plusieurs nouveaux syndicats ou bien de la reconstitution de syndicats disparus. C'est ainsi que les syndicats de Chauvigny (Céramique et Industrie du Bois), qui étaient disparus depuis de longues années, ont repris leur activité dans le courant de 1934. Les Employés communaux de Chauvigny qui dépendent du Syndicat Départemental, viennent de prendre leur existence comme section du S D. Les syndicats d'ouvriers boulangers de Poitiers et de Châtellerault viennent d’être eux aussi reconstitués dans les premiers jours de 1935.
Malgré la reconstitution de ces nouveaux syndicats, nous avons constaté un fléchissement dans nos effectifs, les causes en sont diverses. Certains syndicats de fonctionnaires par exemple, ont perdu des adhérents du fait de la mise à la retraite anticipée, conséquence des décrets-lois, et de très nombreux camarades n'ont pas été remplacés dans leur emploi. D'autres syndicats furent durement atteints par la crise et par conséquent par le chômage, de ce fait ils perdirent des adhérents. Enfin, nous devons bien le dire, nous avons perdu des adhérents qui étaient venus à nos organisations sans aucun idéal de classe, et qui pensaient sans doute que leur unique devoir de syndiqués consisterait toujours il payer leurs cotisations. D'autres sont partis parce qu'il y avait une action il mener et peut être aussi des risques à courir. En somme, nous n’avons pas il regretter outre mesure certaines de ces défections.
Comme on le voit notre U.D. n'a pas échappé aux conséquences de cette dure année 1934. Commencée sous le signe de l'émeute fasciste du 6 février, ce fut aussi l'année de la répression gouvernementale et patronale. Répression qui s’est exercée dans tous les domaines, contre les libertés, contre les salaires, etc ...
Ajoutons à cela la terrible crise qui jette sur le pavé des milliers et des milliers d'ouvriers sans travail et nous devrons convenir qu'il a fallu il à certains moments un grand courage aux militants responsables pour affronter la bataille.
Activité syndicale
Dans notre département et depuis notre dernier congrès l'activité syndicale s'est manifestée de diverses façons soit qu'il s'agisse de la défense des intérêts de nos camarades fonctionnaires ou agents des services publics, soit encore qu'il s'agisse de défendre ou représenter les ouvriers de l'industrie privée.
Nos camarades fonctionnaires et agents des Services publics se sont dressés à maintes reprises contre l'arbitraire, contre les diminutions de salaires, contre les décrets-lois iniques et aussi contre toute atteinte à leur liberté et à leur dignité. Tâche ingrate entre toutes lorsque l'Etat patron n'est que l'instrument servile des intérêts privés et de toutes les forces de réaction et de régression sociale,
Dans l'action que les fonctionnaires ont entreprise sur le plan national, l'UD, de la Vienne s'est rangée à leurs côtés et à pris une part active à l'organisation et à la réalisation des réunions, meetings et manifestations. Demain, comme hier, le Cartel des Services Publies de la Vienne, représenté maintenant par le dévoué camarade Bonnet, peut compter sur notre concours le plus absolu. Demain, nous continuerons à coordonner l'action syndicale, car il nous faut maintenir et développer cette sorte de synthèse ouvrière que forment dans un même organisme les ouvriers de l'industrie ou du commerce et les fonctionnaires. Certes, les uns et les autres n'ont pas toujours des revendications identiques, il arrive parfois qu'ils ne se comprennent pas, il n'empêche que lorsqu'il s'agit de défendre les libertés, toutes les libertés, de s'opposer à tout régime de force ou de dictature, de réclamer l’émancipation du prolétariat et son droit à la vie, l'action des uns ne peut être efficace qu'à la condition qu'elle soit suivie, accompagnée même, par l'action des autres.
Nos camarades de l'industrie privée n'ont pas été plus épargnés que les fonctionnaires, tous ont dû se dresser contre les diminutions de salaires que le patronat a voulu leur imposer.
Deux grèves ont éclaté dans le courant de l'année 1934. La première, celle des ouvriers tailleurs de Poitiers, qui appartiennent à une profession touchée par la crise et aussi par une certaine concurrence ; la deuxième, celle des ouvriers de la Céramique de Chauvigny dont les salaires ont été diminués plusieurs fois déjà n’ont pas voulu accepter une nouvelle diminution. En ces deux occasions je crois avoir mis tout en œuvre pour soutenir nos camarades et les aider à obtenir satisfaction. Nos camarades tailleurs n'ont d'ailleurs pas à se féliciter de l'arbitrage de leur conflit par l'autorité préfectorale qui, disons-le, ne leur a pas donné totale satisfaction.
Le conflit était engagé dans des conditions difficiles, il n'en résulte pas moins qu'ils se sont dressés tant qu'ils l'ont pu contre une injustice par trop grande; tout le mérite est pour eux.
Les ouvriers de la Céramique, eux, ont eu gain de cause, après trois jours de grève ; à l'issue de cette grève ils ont constitué un syndicat sur lequel ils fondent les plus grands espoirs; mais qu’ils restent vigilants.
Application des lois sociales
L'activité que j'ai dû mener au sein des Commissions auxquelles l'UD collabore n'est pas moindre que celle menée dans les réunions syndicales ou publiques qui ont été faites au cours de l'année écoulée, Il est bon de rappeler que l'UD de la Vienne a des représentants dans toutes les commissions locales ou départementales où les intérêts ouvriers peuvent être discutés, telles que : les Commissions du Travail, de l'Office de Placement, de l'Enseignement technique, des allocations familiales, des fonds de chômage, etc..., et tout dernièrement nous ayons eu à désigner des représentants au Conseil d'administration de la Caisse départementale d'Assurances Sociales et à la Commission de contrôle pour l'emploi de la main-d'œuvre dans les grands travaux.
Certes, le rôle que nous remplissons, mes camarades et moi, au sein de la plupart de ces commissions, est un rôle consultatif, mais l'intérêt pourtant n'en est pas moins grand.
La preuve en est dans l'hostilité que rencontrent toutes nos propositions auprès des autres membres de ces commissions qui eux sont des patrons et viennent y défendre' le point de vue patronal avec une ténacité qui nous fait croire qu'ils y attachent eux une grosse importance. Je pourrais citer en passant l'exemple des allocations familiales dont le taux ne fut fixé qu'après m'être défendu et avoir refusé la proposition patronale qui aurait lésé de plusieurs centaines de francs, et par an, les assujettis à cette loi; l'exemple aussi de la commission du Travail où nous défendons, malgré l'hostilité des patrons, les congés payés, le repos, les jours fériés, la réduction du temps de travail, etc...
Enfin notre activité s'est aussi exercée dans le domaine de l'application des lois sociales. Là j'aborde, je puis le dire, un des problèmes les plus préoccupants pour un secrétaire d'Union Départementale. Nous sommes en effet dans un pays où les lois sociales et de protection ouvrière sont des plus nombreuses, malheureusement la majeure partie de ces lois ou des décrets qui en déterminent les modalités sont inappliqués.
Prenons pour simple exemple la loi du 23 avril 1919, vieille de 16 ans, et qui fixe à 8 heures la durée du travail journalier. Cette loi est encore inappliquée parce que les décrets qui fixent son application ne sont pas encore tous pris.
Conformément à la loi du 23 avril 1919, « les décrets seront pris après consultation des organisations ouvrières et patronales intéressées », c'est ce qu'il ne faut pas oublier Et si dans un département il n'existe pas de syndicats ouvriers ou patronaux de telle ou telle industrie, personne, bien entendu, ne demandent la prise du décret et la loi ne sera jamais applicable.
De plus, nous devons bien reconnaitre que les services de l'Inspection du travail sont insuffisants pour veiller à l'application des lois et relever les infractions.
Qu'on en juge, l'Inspecteur du Travail qui est à Poitiers doit s'occuper de la Vienne et d'une grande partie du département de l'Indre; il lui est donc matériellement impossible, malgré sa bonne volonté, de relever toutes les infractions qui contribuent cependant en grande partie au chômage dans le département.
Il est, en effet, intolérable de constater qu'au moment où le chômage sévit dans l'industrie et le commerce, des employeurs fasse effectuer des heures supplémentaires. J'ai signalé sans hésiter à M. l'Inspecteur du Travail, tous les cas de violation des lois sur la durée du travail ou le repos hebdomadaire qui ont été portés à ma connaissance. Des procès-verbaux ont suivi et notre U. D., en certains cas, s'est portée partie civile.
Nous avons aussi éprouvé beaucoup de difficultés dans l'application de la loi des allocations familiales qui, comme on le sait, n’est encore qu’incomplètement appliquée ; bien des camarades m'ont soumis leurs doléances, je suis intervenu en leur faveur, mais je, puis bien dire pas toujours avec succès, car m'étant adressé à certaine Caisse de Compensation qui règle avec trois mois de retard, j'en suis encore à attendre la réponse.
Cependant nous avons réussi à faire sortir, durant l'année dernière, deux décrets qui fixent l'application de la loi de 8 heures dans les boucheries et les charcuteries de la Vienne, un autre décret reste en suspens c'est celui des commerces d'alimentation de détail pour lequel nous attachons cependant une grosse importance.
Enfin, la constitution des Syndicats des boulangers m'a permis de demander en leur nom la prise du décret qui fixera l'application de la loi de 8 heures dans celte corporation si atteinte par le chômage,
Main-d'œuvre étrangère
Je veux aussi dire un mot de nos interventions en faveur de la protection de la main-d'œuvre nationale. Au dernier C.C.N. de la CGT je suis intervenu en ce sens pour dire que si nos organisations syndicales réclamaient énergiquement le droit d'asile pour les réfugiés étrangers qui ne trouvent plus guère que sur le sol français l'asile qui leur assure une sauvegarde plus ou moins relative, il y avait aussi un problème de la main-d'œuvre étrangère qu'il fallait examiner sérieusement..
Dans notre département la majeure partie des ouvriers étrangers est occupée dans les travaux du bâtiment, à Poitiers en particulier. Nous n'aurions rien à dire à cela si les ouvriers étrangers ne venaient pas souvent concurrencer la main-d’œuvre française dans les travaux qu’ils effectuent. Cette concurrence se pratique avec la complicité certaine des employeurs qui voient dans cette main-d'œuvre un élément docile et qui, dans bien des occasions, en raison de certaines conditions de travail n'est pas soumise à la réglementation sur la durée du travail et échappe totalement au contrôle. Ceci explique les raisons pour lesquelles, malgré l'hostilité patronale, nous ayons fait prendre, en accord avec les syndicats du bâtiment, deux décrets qui fixent les pourcentages de main-d'œuvre étrangère qui peuvent être employés dans les travaux privés et publics.
Le chômage
Le chômage a pris dans notre département des proportions que nous n'avions pas connues jusque-là ; Poitiers et Châtellerault totalisent à l'heure actuelle plus de trois cents chômeurs qui appartiennent aux professions les plus diverses, professions qui ne sont cependant pas toutes atteintes par la crise, exemple les boulangers parmi lesquels 50 ouvriers sont en chômage pour notre seul département.
Selon les décisions de nos congrès antérieurs j'ai réclamé et obtenu, non sans peine, l'ouverture des fonds de chômage de Poitiers et Châtellerault qui ont été ouverts en avril dernier et qui, malheureusement, ont enregistré depuis cette date de nombreuses demandes d'allocations de chômage.
Je ne veux pas m'étendre longuement sur cette question que le congrès aura à examiner et auquel je fournirai les explications complémentaires, je veux seulement indiquer que, bien que des dispositions soient prises d'ores et déjà en vue de l'ouverture éventuelle du fonds départemental de chômage auquel de nombreuses communes ont adhéré, ce ne sont là que des mesures illusoires contre ce fléau qui s'appelle le chômage. Il faut donc faire autre chose, il faut s'orienter vers une voie nouvelle ; rien ne sert en effet d'ouvrir des fonds de chômage si nous n'ayons pas d'autres mesures à proposer, le chômage ne se résorbe pas avec les allocations qui sont servies, bien au contraire,
Notre congrès aura donc à examiner la question, les suggestions seront accueillies avec plaisir. Dès maintenant, il apparaît que, n'examinant le problème que dans le cadre départemental, celui-ci est possible à résoudre si les pouvoirs publics, département, communes et services divers veulent accepter les suggestions que notre congrès ne manquera pas de formuler.
L'Unité syndicale
Une autre question que notre congrès aura connaître est celle de l'Unité Syndicale. Durant l'année passée ce fut bien sans conteste une des questions qui passionnèrent le plus les débats syndicaux, Dans. tous les Congrès fédéraux nos camarades des Syndicats ont eu à connaître la question de l'Unité ; les deux derniers comités confédéraux de la CG.T. ont consacré plusieurs journées à l'examen du problème ; des délégations de la C.G T et de la CGTU se sont rencontrées pour examiner les bases possibles de la reconstitution de l’unité syndicale brisée par le départ des unitaires en 1921.
Sur une seule question les unitaires semblent d'accord avec nous : la reconstitution de la vieille CGT.
Sur les autres questions posées par la CGT : affiliation à l'Internationale, indépendance du mouvement syndical vis-à-vis des gouvernements et des partis politiques, condamnation des fractions, la CG T, attend les réponses de la CGTU.
Tels sont les faits. Le congrès aura donc à connaître des décisions prises par le dernier Comité Confédéral National relativement à l'unité syndicale. Personnellement, j'aurais à rendre compte du mandat qui m'avait été confié et je crois l'avoir accompli scrupuleusement.
Le désir d'unité organique est grand dans la classe ouvrière, c'est qu'en effet il apparait que seule l'unité organique peut redonner force et vigueur au prolétariat organisé. L'Unité d'action, le front unique sont d'effets plus ou moins éphémères, plus ou moins efficaces, il n'en reste rien ou pas grand chose. L'unité organique constitue l'organisation forte, forte par le nombre, forte par la discipline dans l'action.
Ce désir d'unité a poussé des camarades de quelques fédérations, et en particulier nos camarades cheminots, à accomplir un premier pas, le plus facile certes, et qui a consisté à constituer d'abord des syndicats uniques et des syndicats unifiés ensuite. Dans la Vienne, les syndicats des cheminots de Poitiers et celui des cheminots de Châtellerault sont devenus des syndicats unifiés. L'échéance à laquelle devait prendre fin les syndicats unifiés était fixée au 1er avril 1935. Qu’arrivera-t-il alors à cette date déjà dépassée au moment où j’écris ?
Nos camarades instituteurs ont eux aussi constitué, pour un temps déterminé, un syndicat unique entre la section du syndicat national et la section unitaire. Depuis quelques mois déjà la section unitaire ne faisait plus preuve d'une vitalité normale et c'est, je crois, la raison déterminante de la formation de ce syndicat unique.
En dehors des syndicats unitaires sus-énoncés, il reste, je crois, dans la Vienne en tout et pour tout trois ou peut-être quatre organisations non confédérées et un syndicat autonome.
Voilà donc la physionomie du problème de l'Unité en ce qui concerne le département.
L'Unité, elle doit se faire et elle se fera ; la CGT a pris sur cette question une position absolument nette et qui ne prête à aucune équivoque. Il n'y a pour cela qu'à relire le compte rendu sténographié de l'entrevue qui eut lieu le 25 janvier dernier entre délégués unitaires et confédérés paru dans le Peuple du 8 février ; on verra que les principes posés comme base de la reconstitution de l'Unité sont les principes qui présidaient aux destinées de la « vieille C. G. T. », que les uns et les autres voudraient voir revivre.
En ce qui me concerne, je ne me permettrais jamais de demander aux camarades unitaires de la Vienne de désavouer sur ce problème l'avis de leurs délégués, je dirai simplement que la condition de la véritable unité comme nous la concevons c'est qu'elle se réalise dans la clarté, sans équivoque et, tenant compte de la structure du syndicalisme français dans l’indépendance yis-à-vis des gouvernements, des partis politiques ou sectes philosophiques, et que soit écarté à tout jamais ce qui fut le germe de la scission, c'est-à-dire les fractions et tendances au sein même de l'organisation.
La propagande
Avant de terminer ce rapport, je veux dire aussi quels furent nos efforts pour intensifier la propagande dans nos milieux ruraux. Un de nos syndicats s'est particulièrement signalé dans cette tâche, j'ai cité le syndicat des instituteurs qui a fait un effort particulièrement méritoire pour la diffusion de La Terre Libre. Il est incontestable que cet organe largement diffusé est un instrument de propagande pour nos campagnes.
D'un autre coté, La Vienne ouvrière et syndicaliste en est à son 17e numéro. Ce petit journal bien modeste et qui cependant me coûte personnellement beaucoup d'efforts, de temps et de soucis, a tiré régulièrement à 3.500 exemplaires qui ont été distribués aux syndicats et dans divers milieux.
Cependant, qu'il me soit permis de dire que, malgré les services insoupçonnés que ce journal rend à notre mouvement syndical, il n'est pas toujours ce qu’il devrait être. J'avais rêvé, en le créant, d'un journal dans lequel tous nos camarades auraient plus ou moins collaboré, c'était le moyen le plus sûr de le rendre combattif et intéressant. J'ai dû revenir de mes belles illusions et la collaboration que j'ai pu obtenir n'a été que passagère et sans lendemain ,
J'étais en droit cependant de compter sur la collaboration de camarades plus qualifiés que moi-même en cette matière, il m'a fallu, pour assurer sa parution régulière, me faire journaliste d'occasion et je ne suis pas sûr d'y être encore parvenu.
Qu'il me soit donc permis de renouveler l'appel que notre camarade Gelin adressait à tous l'an dernier. Un effort s'impose pour faire de la Vienne ouvrière et syndicaliste un véritable journal syndical ; que tous y collaborent !
Enfin, quelques réunions de propagande ont été organisées et toutes ont donné les meilleurs résultats, Le plan de réorganisation économique élaboré par la C. G. T. a servi de bases à des réunions organisées à Civray, Couhé-Vérac, Vivonne, Chauvigny et cette tournée de propagande, quoique difficile à réaliser, se poursuivra. Il faut que dans tous les milieux nous fassions entendre la voix ouvrière, il nous est facile de démontrer, nous plaçant strictement sur le terrain syndical, que les méthodes employées jusqu'à ce jour sont périmées et que nous ne sortirons de la crise actuelle qu'en adoptant les solutions que nous préconisons : réduction du temps de travail sans diminution de salaire, nationalisation du crédit et des industries-clef, politique de grands travaux, etc., etc ... II faut aussi que nous dénoncions, dans les milieux ruraux la démagogie de ceux qui prétendent représenter les paysans.. et qui ne sont, que des hobereaux soutenus par la grosse bourgeoisie terrienne ou les actionnaires des grands moulins.
Dans les réunions auxquelles j'ai pris part, ou dans les contradictions apportées j’ai pu remarquer le danger, il consiste pour les, démagogues à dresser l'ouvrier des campagnes contre celui des villes ; prenons-y garde nos adversaires possèdent des moyens inépuisables, restons vigilants.
Les organisations syndicales et la jeunesse
Enfin, il y a une chose que nous avons trop délaissée, 1'organisation de la Jeunesse. La jeunesse trop souvent nous échappe, les enfants même de nos camarades ouvriers sont souvent enclins à partir vers les patronages que l'on ne saurait dénommer, parce que les patronages font ce qu'il faut pour attirer la jeunesse.
De ce côté, reconnaissons que nos adversaires sont plus forts que nous-mêmes, ils disposent de certains dévouements qui parfois font défaut chez nous.
Je sais bien que depuis l'an dernier un sérieux effort a été fait chez nous, des Jeunesses Syndicalistes ont été créées à la Bourse du Travail de Châtellerault et j'en félicite les camarades qui doivent poursuivre cet effort dont ils auront les meilleures résultats. A Poitiers, l'Union locale a patronné un groupement de jeunes « Le Groupe des Amis de l'Enfance ouvrière», nous prodiguons sans compter nos encouragements à ce groupement qui, grâce à l’activité et au dévouement de quelques jeunes gens et jeunes filles, est en pleine prospérité. Cet effort, qui vient peut-être à retardement, mérite que tous nos camarades s’y intéressent ; ils le peuvent et ils le doivent, car si nous abandonnons nos jeunes gens ils participeront chez nos adversaires qui eux savent admirablement les attirer.
La solidarité
La terreur hitlérienne a refoulé chez nous des milliers de camarades syndicalistes, marxistes ou révolutionnaires ; la révolution espagnole a également obligé bien des camarades des organisations syndicales ou politiques à venir chercher en France le refuge sinon la tranquillité. Pour ces camarades nous avons pratiqué la plus large solidarité, car la plupart sont dans un état de dénuement complet.
Dans notre effort de solidarité, nous n’avons pas oublié non plus nos camarades chômeurs et au cours de l’hiver le bénéfice d’une fête organisée par la Bourse du Travail de Poitiers, plus de deux mille francs, leur ont été répartis. Un nouvel appel nous a encore permis de soulager quelques infortunes et je regrette vivement que l’appel que j’avais lancé n’ait pas été mieux entendu, car nous aurions pu faire davantage.
Enfin, nous avons eu plusieurs grèves à soutenir, outre les deux grèves de la Vienne, nous avons adressé notre obole aux camarades grévistes de Millau, du Livre de Bordeaux, de Roanne, etc.
Conclusions
Vous m’excuserez, chers Camarades, car je me suis étendu, peut-être un peu trop longuement, dans la rédaction de ce rapport moral, j’ai cru cependant qu’il était nécessaire de relater tous les faits qui ont marqué l’activité et la vie syndicale de notre Union départementale depuis notre dernier congrès. Vous remarquerez que dans tous les domaines, l’activité déployée pour la défense des intérêts ouvriers a été pour moi un souci constant et que dans toutes les occasions je n’ai cessé de consacrer tout mon temps et tous mes efforts vers ce but. Il m’est arrivé quelques fois de déplorer que la collaboration de tous les syndicats et de tous les syndiqués ne soit pas plus étroite dans la tâche ingrate qui souvent m’incombe, jamais je ne me suis découragé, d’ailleurs on ne lutte pas si l’on n’est pas optimiste. Et c’est en faisant appel à tous nos camarades, en leur demandant une collaboration toujours plus étroite, que je terminerai ce rapport. Il ne suffit point en effet d’avoir, comme je l’ai moi-même, la satisfaction du devoir accompli, il faut encore se tourner vers l’avenir et vers les tâches de demain qui appellent tous nos efforts et tout notre courage.
H. Souchaud
Secrétaire de l’UD
le 02/01/2021 à 18:23
Source : La Vienne Ouvrière et Syndicaliste
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