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0361709/01/1950CHATELLERAULT

50 ANNÉES DE SYNDICALISME - FO

Monsieur Paulet, secrétaire du syndicat CGT-FO de la Manufacture, nous communique :

En ce début d’année 1950, nous voulons non pas faire le bilan de l’année qui vient de s’écouler mais celui du demi-siècle et regarder honnêtement ce qu’a été l’évolution du sort de la classe ouvrière au cours de cette première moitié du 20e siècle. En regardant de près on est vite convaincu que les travailleurs d’aujourd’hui n’ont aucun motif de regretter ce que le music-hall et la radio appellent abusivement la « belle époque ». Au début du siècle et jusqu’en 1920, la journée de travail était de dix heures et il n’était pas question de la semaine des deux dimanches, ni même de la semaine anglaise. La notion de salaire minimum était inconnue. Les assurances sociales n’existaient pas. Le droit syndical était battu en brèche par un patronat de combat. La législation sociale comportait d’énormes lacunes. Il n’existait qu’un nombre infime de conventions collectives dans quelques professions déjà fortement organisées dans les syndicats, mais la plus grande partie de la classe ouvrière subissait intégralement la dure loi de l’offre et de la demande sur le marché du travail. La défense des intérêts ouvriers par les délégués librement élus dans les organismes tels que les Comités d’entreprise ne se concevait même pas encore à cette soi-disant « belle époque ». En fait, au début du siècle, c’était peut-être une belle époque pour une mince couche de privilégiés mais certainement pas pour ceux qui n’avaient pour vivre qu’un salaire ou un traitement souvent inférieur à ce qu’on appelle aujourd’hui le minimum vital. Il est exact, par contre, qu’au début du siècle le monde venait de connaître une longue période de paix et que la plupart des gens croyaient alors à cette possibilité d’évolution progressive par le développement de la technique et le maintien de la paix entre les nations. Mais, si les espoirs mis dans les progrès techniques ont été réalisés et souvent même dépassés ; l’effondrement des espérances de paix a été total. A la guerre de 1914-18, qui devait être la « dernière » a succédé une mauvaise paix qui n’a été en fait, qu’un répit au cours duquel a rapidement mûri la seconde guerre mondiale. Il n’est pas besoin d’être exagérément pessimiste pour admettre qu’au début de 1950 les chances de paix durable sont fragiles puisque les représentants des nations qui s’étaient alliées momentanément pour écraser les régimes totalitaires n’ont pu se mettre d’accord sur un projet acceptable. Le malaise international pèse lourdement sur les principaux aspects de notre vie nationale. Il impose de lourdes charges et crée par cela même des mécontentements exploités par des pêcheurs en eaux troubles. Ramenée au seul domaine syndical, la crise de l’après-guerre a provoqué et provoque encore d’importants bouleversements. La main-mise d’un parti politique depuis la fin de la guerre au sein même de l’ex CGT unifiée n’a fait qu’accroître le mécontentement des syndicalistes imbus de libertés et d’indépendance. Ce malaise devait avoir son dénouement au cours de la grande épreuve de force des grèves de fin 1947. La riposte fut immédiate par la création d’une nouvelle centrale syndicale qui groupe tous les travailleurs qui ne veulent pas être les robots d’aucun parti politique. Ce qui avait commencé spontanément en France en 1948, s’est élargi sur le plan international au cours de l’année écoulée par le dislocation de la FSM et la création à Londres d’une confédération internationale des syndicats libres groupant plus de 45 millions d’adhérents.

La situation est donc maintenant parfaitement nette. Les syndicalistes libres ont retrouvé leur totale indépendance d’organisation et d’action à l’égard de ceux qui ne peuvent et ne veulent être que les dociles instruments d’un pouvoir dictatorial. C’est dans ce nouveau cadre qu’il faut placer nos souhaits et nos espoirs pour l’année 1950. Pour le syndicalisme français nous souhaitons un large regroupement de toutes les forces ouvrières antitotalitaires, aussi nécessaires à la sauvegarde de la liberté qu’à une action revendicative efficace. Pour le syndicalisme international, nous souhaitons une heureuse et rapide application du programme et des méthodes d’organisation adoptées par le congrès constitutif de la Confédération Internationale des Syndicats Libres.

le 24/01/2021 à 16:34

Source : Le Libre Poitou

historique, international, scission

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