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0039808/12/1905POITIERS

La grève des ouvriers boulangers

MÉCONTENTEMENT DES GRÉVISTES UN APPEL

Comme nous le disions hier soir, les grévistes se montrent assez peu satisfaits de l'ajournement à dimanche demandé par M. Meunier pour la convocation de ses collègues en vue de la formation d'un comité de conciliation.

M. Limousin, secrétaire général de la Bourse du Travail, a eu ce matin à ce sujet, un entretien avec M. Giraud, Juge de Paix du canton sud.

Les délégués ouvriers ne seraient point invités à prendre part, dimanche, à la réunion du comité patronal de conciliation qui se tiendra au bureau de M. le Juge de Paix. L'ouverture des négociations est donc forcément remise à la semaine prochaine.

Les grévistes estiment que ce retard ne peut qu'aggraver le conflit et en rendre la solution plus délicate. Ils espéraient une prompte entente.

Cependant ils semblent bien décider à ne pas reprendre le travail avant la fin du conflit, « nous pouvons résister » nous a dit ce matin un gréviste, « nous avons de l'argent en caisse et cet argent épuisé nous en recevrons de nos camarades des syndicats des villes voisines. D'ailleurs des listes de souscription sont prêtes ».

Hier soir, dès qu'il eut connaissance du résultat de l'entrevue de M. Meunier avec M Giraud, le comité de grève adressa à tous les ouvriers boulangers de Poitiers l'appel suivant :

CHAMBRE SYNDICALE DES OUVRIERS BOULANGERS - COMITÉ DE GRÈVE

Aux ouvriers boulangers.

Camarades,

Vos camarades qui ont suspendu le travail viennent faire appel à vos sentiments de dignité et d'honneur.

La résistance des patrons à nos légitimes revendications provient de ce que quelques-uns d'entre vous ont cru en leurs promesses. Vos patrons ont montré leur union en s'aidant et cela malgré la concurrence qu'ils se font chaque jour.

Nous, dont les intérêts sont les mêmes, qui, tous, ne pouvons à peine vivre avec le maigre salaire qu'ils nous accordent, nous devrions être unis, notre intérêt, celui de notre famille, notre devoir, nous le commandent.

Nos patrons, par le concours que vous leur prêtez, espèrent nous réduire par la faim. Vous ne le permettrez pas.

Vous répondrez à notre appel, vous viendrez à la réunion générale des ouvriers boulangers qui aura lieu le jeudi 7 décembre à la Bourse du Travail, à 3 h de l'après-midi.

Vous pouvez être certains d'être accueillis en camarades.

Ensemble nous examinerons la situation de notre corporation et nous prendrons les mesures pour assurer notre triomphe qui sera celui du Droit et de la Justice.

Vive l'union ouvrière pour la réunion générale des ouvriers boulangers.

Les délégués.

RÉUNION DES DÉLÉGUÉS OUVRIERS

Les délégués ouvriers se réuniront samedi dans l'après-midi à la Bourse du Travail, pour prendre une décision en ce qui concerne l'attitude à observer par la chambre syndicale ouvrière vis à vis du comité patronal de conciliation.

DÉNONCIATION ANONYME - MENEUR ITALIEN !

Une lettre anonyme a été adressée hier soir à M. Tuaillon, commissaire central, pour lui signaler la présence d'un italien parmi les grévistes.

Cet italien, dit la lettre, mène les ouvriers poitevins, c'est lui qui est l'instigateur de la grève, il est l'organisateur de la résistance.

Suivait le signalement de l'italien.

Or l'ouvrier visé est originaire de Ruffec. Il s'appelle Cailler Georges. A ça près !

UNE LETTRE DU COMITÉ DE LA GRÈVE

Nous avons reçu la lettre suivante :

"Monsieur le directeur,

" Le comité de la grève des ouvriers boulangers vous serait très obligé de bien vouloir insérer la note suivante en réponse aux déclarations de M. Meunier qui prétend que MM. les patrons ne peuvent se réunir avant dimanche pour choisir leurs délégués conformément à la loi sur l'arbitrage qu'il s'était engagé à accepter.

"C'est véritablement, chez M. Meunier, une habitude de remettre les réunions patronales. Lors de la nomination des délégués pour arriver à une entente, il remettait les réunions du samedi au mardi, puis au mardi suivant, ce qui a fini par lasser les ouvriers. M. Meunier, qui se dit respectueux de la loi, la viole ouvertement. Notre demande d'arbitrage est du 4 décembre, elle a été affichée le 5, le 8 au soir les délais seront expirés. Pourquoi attendre au dimanche quand nous savons qu'un grand nombre de patrons ne demandent qu'à accepter ce que nous désirons et qui, s'ils ne viennent pas signer, c'est parce qu'ils sont syndiqués. Ils attendent d'être convoqués, voilà la vérité. M. Meunier, qui a lassé la patience des ouvriers avec ses remises, espère sans doute que d'ici dimanche nous aurons capitulé. Il se trompe et cela au grand détriment des patrons, des ouvriers et aussi du public.

.../...

Pour le comité de la grève et par ordre, le secrétaire : Deschamps.

CONTINUATION DE LA GRÈVE

Dans la réunion de cet après-midi les grévistes ont voté la continuation de la grève. Ils ont rédigé le texte d'une affiche qui sera placardée demain matin.

A la sortie de la réunion les grévistes ont parcouru diverses rues en cortège en conspuant M. Meunier qu'ils accusent d'être l'auteur de l'ajournement des négociations.

Des patrouilles de gendarmes et d'agents circulent en ville.

 

 

le 08/04/2020 à 12:03

Source : L'Avenir de la Vienne

boulangers, réunion, revendications, repos hebdomadaire

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