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Sortant d’un entretien avec le directeur des études et fabrication d’armements un délégué syndical dit : « La Manu de Châtellerault doit passer dans le privé dans un bref avenir ! ».

Mardi soir, vers 18 heures, la route nationale 10 a été bloquée, devant la Manufacture d’armes de Châtellerault, non loin du pont d’Estrée. Plus de douze cents ouvriers, agents de maîtrise et techniciens se trouvaient groupés face à l’entrée principale de l’établissement. Ce rassemblement avait été créé par l’attente des délégués syndicaux : CGT, CGT-FO et CFTC, ouvriers et maîtrise, qui avaient demandé audience à M. L’Ingénieur général directeur de la Direction des études et fabrications d’armements, en visite d’inspection à Châtellerault.

Depuis plusieurs mois des bruits circulent dans Châtellerault : la Manufacture fermerait ses portes ; elle entrerait dans le secteur privé. Ceci n’avait pas manqué de causer une vive émotion parmi les membres du personnel de l’établissement, dont « Centre Presse » s’est fait l’écho à plusieurs reprises.

C’est pour avoir des éclaircissements sur ces bruits que l’audience avait été sollicitée, amenant la démarche des responsables des syndicats auprès de ladite direction.

Vers 18 h. 30, un des membres de la délégation qui venait d’être reçue sortit de l’établissement et fit, à tous les ouvriers toujours groupés devant les portes, une déclaration dont nous transcrivons la teneur, sous toutes réserves.

Selon ce délégué, la conversation aurait permis d’apprendre :
1) La Manufacture pourrait être appelée, dans un proche avenir, à passer dans le secteur privé.
2) La vente de l’annexe de la Brelandière serait alors la première à être envisagée, si les accords – qui seraient imminents – aboutissent.
3) Si la Manufacture d’armes passait dans le secteur privé, les ouvriers qui pourraient être employés dans les nouvelles usines garderaient leurs avantages acquis.
4) Tous les ouvriers et techniciens doivent être avertis, dès aujourd’hui, par tracts de la démarche, de sa portée et des réponses qui ont été faites par le directeur général principal de la D.E.F.A.

Cette déclaration, rappelons-le, émane d’un délégué syndical et a été prise sur le vif. Elle ne saurait, jusqu’à la publication d’un communiqué officiel, qui ne saurait tarder maintenant, constituer autre chose qu’une information très officieuse et unilatérale.

Nous la publions à titre d’information, sachant déjà l’importance qu’elle va revêtir non seulement pour Châtellerault et sa région, mais pour tout le département et pour toute la région. Cette reconversion de la « Manu » dans le secteur privé modifiera en effet considérablement le marché du travail local et départemental, mais aura aussi des répercussions sociales, qu’il est impossible aujourd’hui de mesurer.

Quoi qu’il en puisse être, nous souhaitons maintenant que le public soit très exactement tenu au courant. La Manufacture étant d’une part un établissement d’État, le personnel qu’elle emploie en faisant l’un des tous premiers groupes industriels de la région, d’autre part, avec ses quelques deux mille ouvriers, son sort intéresse tout le monde ; les ouvriers certes, directement touchés, mais encore les industriels, ouvriers, cadres du secteur privé ; mais enfin les citoyens : la reconversion d’une usine d’armement ayant des implications qui dépassent l’économie purement locale.