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0516415/12/1961CHATELLERAULT

1.800 OUVRIERS EN GRÈVE HIER

La Brelandière passant au secteur privé en juin 1962
« Nous sommes désormais mobilisés » ont déclaré les manifestants
Une délégation veut rencontrer le Ministre

Dans l’ordre et le calme, hier après-midi, 1.800 employés, ouvriers et cadres de la Manufacture d’armes de Châtellerault ont manifesté contre une décision, dont ils avaient eu connaissance en fin de matinée ; « Nous nous considérons désormais comme mobilisés ». Telle a été la conclusion de cette manifestation qui naquit spontanément et se développa très vite, pour prendre une grande ampleur.

Elle n’est en fait que la continuation de ce qu’on appelle maintenant « l’Affaire de la Manufacture de Châtellerault » - En effet, depuis un certain nombre d’années maintenant, on parlait périodiquement de la fermeture de la Manufacture, de son transfert possible au secteur privé. Une première mesure vient d’être connue officiellement. Récemment, la suite d’une communication qui était faite par l’inspecteur de la DFA, une manifestation semblable à celle d’hier, se déroulait à Châtellerault.

Mais jeudi, peu avant midi, la direction de la Manufacture faisait connaître aux cadres, aux agents de maîtrise et aux délégués syndicaux, qu’elle venait d’être informée par lettre, qu’à compter du 1er juin prochain, l’usine de la Brelandière où sont employés 337 ouvriers, aurait une nouvelle affectation et une nouvelle destination.

Cette usine fabrique des moteurs de GMC, des boîtes de vitesse et des ponts de camion. La Société de fabrication et d’équipement pour la navigation aérienne (SFENA), qui travaille pour Nord-Aviation et Sud-Aviation, en étant devenue la propriétaire, les employés de la Manu ont considéré que cette cession était une première attaque contre l’ensemble de la Manu, qu’ils savent menacée et immédiatement ce fut le mot d’ordre de grève qui fut lancé, suivi à l’unanimité.

Un long défilé dans Châtellerault

A 14 h. 30, alors que sur place restaient les équipes chargées de la sécurité, un long cortège où se mêlaient les blouses blanches des techniciens et les bleus des ajusteurs et fraiseurs, quittait la Manu par le quartier de Châteauneuf pour se rendre vers l’Hôtel de ville de Châtellerault.

Un discret service d’ordre veillait à ce qu’aucun accident et incident se produisit et seule la circulation fut quelque peu perturbée pendant le temps que dura le défilé.

Sur les promenades de Blossac

La foule des manifestants se masse alors sur les promenades de Blossac face à l’Hôtel de ville pour entendre les orateurs des diverses centrales syndicales.

C’est M. Paulet, secrétaire de FO, qui prit le premier la parole. Il réclama la démission de la Municipalité, en signe de protestation contre la décision qui venait d’être prise pour la Brelandière. Il indiqua que celle-ci devait être libérée au mois d’avril, pour être remise au 1er juin.

Il remercia les employés de la Manufacture d’avoir répondu aussi massivement à l’appel qui leur avait été lancé. C’est par les mots suivants : « Nous demandons la démission de la Municipalité » qu’il termina sa péroraison.

Tandis que les manifestants scandaient « Démission ! Démission ! ».

M. Autexier, au nom de la CFTC déclarait ensuite : « Mes camarades, vous avez magnifiquement répondu aux provocations inqualifiables du gouvernement. Il ne faut pas baisser les bras. Il faut que l’unité d’aujourd’hui se manifeste à tout instant. Nous voulons que la Manu reste au sein de la DFA.

Au nom de la CGT, M. Augras à son tour remercia les manifestants, leur demandant de garder le même calme pour se rendre à la Sous-Préfecture.

Une délégation reçue à l’Hôtel de ville

A la suite de cette allocution, une délégation importante fut reçue à l’Hôtel de ville par M. Montier, adjoint, en l’absence de M. Pierre Abelin, maire, qui se trouvait à Paris. M. Montier était assisté de M. Grimal, conseiller municipal.

Au nom du Comité de défense qu’il préside et des syndicats, M. Gond exposa la situation à M. Montier.

Celui-ci, après s’être félicité de la dignité et du calme montrés par les manifestants, indiqua que la réaction des châtelleraudais employés à la Manu rencontrait un semblable écho chez les édiles de la ville.

M. Paulet de FO précise ensuite que le général Sorlet, inspecteur général de la DEFA, aurait déclaré « qu’un trait rouge devait être tiré sur la Manu de Châtellerault et que celle-ci devait passer au secteur privé ».

Il fut ensuite signalé que les meilleurs ouvriers de France de 1961 sont sortis de l’établissement en cause et que la Manu, par la qualité comme par la rentabilité, peut supporter la concurrence adverse.

M. Paulet indiqua également qu’il lui avait dit que la main-d’œuvre de la Brelandière ne pourrait pas être employée dans le reste de l’établissement.

L’exemple de ce qui s’est passé à Caen fut cité. Le délégué de la CGT ayant demandé quelle était la position de la Municipalité, M. Montier répondit : « Nous sommes tous d’accord pour que la Manu reste à la DFA ».

Session extraordinaire du Conseil municipal

A la fin de l’entretien, l’adjoint de M. Abelin indiquait qu’il se mettait immédiatement en relation avec le maire pour demander une réunion extraordinaire du Conseil municipal, afin d’étudier la situation.

A la Sous-Préfecture

A l’issue de cette entrevue, M. Gond, du Comité de défense, vint faire part aux manifestants des résultats. Il déclarait :  « Nous avons été reçus par M. Montier en l’absence de M. Abelin. Il nous est apparu que le problème dépassait la compétence de la Municipalité. Aussi faut-il ne compter que sur nous-même. Que notre action soit commune et unie désormais, nous restons mobilisés.

Le cortège des manifestants s’en fut ensuite vers la Sous-Préfecture, où M. Guérineau, secrétaire en chef, la reçue en l’absence de M. le Sous-Préfet.

Mardi ou mercredi prochain, elle se rendra à nouveau à la Sous-Préfecture accompagnée des ouvriers pour être reçue par M. Pasquier.

Un Comité se rendra auprès du Ministre des armées

Jeudi soir, à 18 h. 30, au sein du Comité de défense, une délégation composée de MM. Lasnier, Pont, Grillet, Ladougne , Jutaud et Gond a été désignée pour se rendre auprès de M. Messmer, ministre des Armées.

Le Comité de défense

Le Comité de défense composé de M. Gond, président ; Pont et Boisdron, présidents adjoints ; Touzalin, secrétaire ; Mlle Huguette Branché, Beaufils, secrétaires adjoints ; Roncelin, trésorier ; Bastion, trésorier adjoint, doit se réunir aujourd’hui ainsi qu’une commission d’études comprenant MM. Faucher, Gond, Grillet, Hilaire, Grandin.

 

le 06/12/2021 à 16:26

Source : Centre Presse

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