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Hier matin au Théâtre municipal

Répondant dimanche à l’appel lancé par le Comité départemental d’Action laïque, les délégués des comités locaux venus de l’ensemble du département, les enseignants appartenant aux divers degrés de l’enseignement, les représentants des partis politiques et des centrales syndicales, associés au mouvement, ainsi que divers groupements laïques, s’étaient réunis à 10 heures, au Théâtre municipal en un important meeting.

Au bureau avait pris place autour des présidents Rousseau et Lambert, Bibault, du syndicat national des instituteurs, Leroy de la Fédération de l’Éducation Nationale, Chomel, président de l’Association générale des étudiants de Poitiers, Georges Bonnaire, délégué national du Comité d’Action laïque.

A la tribune également les représentants des partis politiques, des syndicats et tous ceux qui se trouvent associés à ce vaste mouvement.

L’exposé du président Lambert

Prenant la parole le premier, après avoir salué la très nombreuse assistance, le président Lambert dresse un bilan de ce qui a été réalisé dans le passé et déclare :

« Notre mécontentement pour le sort qui est réservé à l’enseignement est la raison de ce rassemblement. Il prélude à celui du 11 février prochain qui se déroulera à Paris en présence de 5.000 personnes. La Vienne y sera représentée par une importante délégation. Ce rassemblement est le dernier stade avant l’action ».

Puis il céda la parole à M. Bibault, secrétaire du SNI.

Le secrétaire du SNI

Le secrétaire du Syndicat national des Instituteurs pour le département de la Vienne avait pour tâche de présenter la situation de l’enseignement du premier degré. Après avoir affirmé que l’école laïque est le bastion de la République et fustigé « les fascistes et cléricaux représentants du capitalisme le plus odieux et le plus sanglant, qui s’opposent au développement et au maintien de l’école de la République « , il déclare :

« On a dit que tout était réglé pour l’enseignement du premier degré. Mais le retard considérable est loin d’être comblé. Depuis de nombreuses années, on attend le groupe scolaire de Bellejouanne et le C.C. de filles de Civray. Tout est loin d’être en règle pour l’avenir. On veut fermer l’école du village parce qu’elle est démocratique. On ne construit pas d’écoles, car cela ne rapporte pas.

Après avoir salué « les laïcs de Brigueil qui donnent un magnifique exemple d’action laïque, et avoir signalé que la lutte était engagée sur le plan juridique, le tribunal administratif en étant saisi », l’orateur signale que dans notre département 186 postes sont tenus par des suppléants et que sur 1.700 postes, il y en a 883 qui ont plus de 30 élèves.

« Ce que nous voulons, conclut-il, ce sont des maîtres mieux payés, la nationalisation de l’enseignement, l’abrogation des lois cléricales. Pour que cette action aboutisse, il faut l’union de toutes les forces démocratiques ».

M. Chomel, président de l’AG

Le président de l’AG situe ensuite le problème de l’enseignement supérieur. En 1961, il y a à Poitiers 5.000 étudiants. Les professeurs sont surchargés, les locaux insuffisants. La Faculté de Droit, la Faculté des Sciences étouffent. Les bourses données aux étudiants sont insuffisantes.

Il conclut : « Il faut donner à l’enseignement supérieur les moyens nécessaires. L’Université, service public de la nation, chargée de l’investissement le plus sûr, celui de la préparation à l’avenir, doit avoir la place qui lui revient ».

M. Leroy de la FEN

Le représentant de la Fédération de l’Éducation Nationale, M. Leroy, devait faire un exposé très complet sur la situation dans l’enseignement du deuxième degré et technique dans le département.

Il cite quelques chiffres : « 600 élèves, dit-il, on été refusés dans les collèges techniques. Que sont-ils devenus ?

« En 1967, il y aura plus de 6.000 élèves à entrer en 6^e. Prépare-t-on cet afflux ? Quand sera prêt le fameux lycée des Champs-Balais, dont il a fallu établir 21 projets ? Le lycée moderne et technique de jeunes filles qui a 1.045 élèves, n’a qu’une seule salle de travaux pratiques. On sait ce qui s’est passé au nouveau collège technique.

« La pénurie des maîtres : 241 professeurs titulaires pour 280 postes. Dans certains établissements, on est resté trois semaines sans professeur d’anglais ; quatre sans professeur de sciences naturelles ; cinq semaines sans professeur de mathématiques. Au collège de jeunes filles de Poitiers, pour 1.045 élèves, il n’y a qu’un seul professeur de physique.

Et l’orateur conclut : « Nos enfants ont droit à autre chose qu’à la soupe populaire intellectuelle qu’on leur sert. Il faut une action des parents et de tous les démocrates pour que l’école, fondement de la République, demeure.

M. Georges Bonnaire, délégué national

Après avoir dit que ce qui était vrai dans la Vienne l’était pour toute la France où « l’école étale ses insuffisances et ses misères », le délégué national parla du problème des aumôneries et conclut : « Trop de temps a été perdu. Il nous faut faire un effort considérable. Il nous faut parler et informer autour de nous, préparer le devenir de nos enfants ».

La motion

A l’issue de ce meeting, la motion suivante fut votée ; elle devait être remise à la Préfecture.

« Les délégués laïcs du département de la Vienne, réunis le 28 janvier au Théâtre :

« Constatant les insuffisances actuelles en locaux et maîtres rendant parfois impossible toute véritable éducation des enfants confiés à l’école et à l’université.

« Prévoyant les immenses besoins de l’EN/ pour assurer sa mission lorsque la réforme de l’enseignement sera rentrée en application en 1967, alors que rien ne se prépare pour ce proche avenir ;

« Constatant qu’en ce moment même le Gouvernement refuse les crédits importants par la loi Astier, la loi Barangé et la loi Debré ;

« Fidèles au serment de Vincennes et la volonté affirmée dans la Vienne par 88.200 signatures de la pétition nationale ;

« Demandent l’abrogation des lois anti-laïques et la nationalisation de l’enseignement ;

« Appellent tous les laïcs à s’unir pour la défense de l’école laïque, fondement de la République et de la démocratie dans ce pays ».