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0611018/05/1966POITIERS

LA VIENNE A VÉCU AU RALENTI

Mouvement de grève largement suivi

Le mouvement de grève générale déclenché hier matin sur l’ensemble du territoire national a été largement suivi dans le département de la Vienne où les activités tant du secteur public que du secteur privé ont été paralysées.

Usines fermées, écoles, lycées, collèges clos, courrier non distribué, transport SNCF largement perturbés, feux de croisement ne fonctionnant plus, cinéma affichant relâche pour l’après-midi, activité stoppée chez les coiffeuses, installations frigorifiques arrêtées, foire-exposition sans musique ont été quelques-uns des aspects de cette journée, sans compter ceux qui, nombreux et surpris, n’avaient pu utiliser leur rasoir électrique et de ce fait se raser.

Tous les services de sécurité et d’urgence ont été assurés.

C’est dans l’enseignement que le mouvement semble avoir été le plus suivi, le pourcentage allant de 86 à 75 % selon les diverses catégories. A la SNCF, plus de 50 %, dont 60 % à la traction. Aux PTT de 36 %, mais certains services, notamment celui des lignes était en grève à 100 % et celui de la distribution à 90 % et celui du tri à 80 %. A l’EDF, pourcentage total 57 %, mais 84 % au Centre EDF de Poitiers.

Pour la Fonction publique ce pourcentage était de 15 % ; pour les Finances de 48 % ; pour les établissements militaires de 50 %.

En ce qui concerne les industries du bâtiment, sur 4.500 employés que compte ce secteur, on estimait à 450 le nombre de ceux qui étaient en grève, soit 10 %.

Le meeting

A 10 heures, un meeting était prévu à la Maison du peuple. Plus de 1.200 personnes y participèrent. Après le rassemblement, Mlle Cornier donna lecture de la résolution commune qui a été rédigée par l’ensemble des délégués de tous les Syndicats présents. Elle était entourée des responsables suivants, lesquels, après le défilé, déposèrent un exemplaire à la Préfecture : M. Laumond (CGT), Girard (CFDT), Tourancheau, Chaumin (FEN) et Hébert.

Un long cortège se forma, précédé des banderoles de chaque syndicat, d’administration ou d’entreprises privées.

Le cortège emprunta la Grand’Rue, les rues du Marché, des Cordeliers, Gambetta, fit le tour de la place Leclerc, avant le rassemblement qui se fit dans l’ordre et le calme, place de la Préfecture.

La délégation a été reçue ensuite et assurance lui a été donnée que le texte de la résolution serait transmis au Gouvernement.

M. Tourancheau rendit compte de l’entrevue et invita les manifestants à se disperser en silence, ce qui se fit.

La résolution

Les travailleuses et travailleurs de Poitiers et de ses environs, du secteur public, nationalisé et de l’industrie privée, en grève le 17 mai 1966 ;

PROTESTENT vigoureusement contre une attitude anti-sociale de l’État et du Patronat consistant essentiellement :
- à développer une propagande insidieuse tendant à faire croire à l’opinion publique que le niveau de vie des travailleurs ne cesse d’augmenter ;
- à refuser tout dialogue sincère avec leurs représentants : les organisations syndicales ;
- à s’obstiner dans une politique de blocage des salaires ;
- à discréditer et déformer les diverses expressions en cours d’un mécontentement général amplement justifié ;
- à installer le chômage et à ne rien faire de valable contre l’insécurité de l’emploi.

Devant cette situation, les travailleuses et travailleurs rappellent leurs revendications essentielles :
Amélioration du pouvoir d’achat et des conditions de vie et de travail
   - pas de salaire au-dessous de 600 francs par mois.
   - négociation des salaires réels.

Dans le secteur public nationalisé
   - Ouverture de véritables négociations au niveau de chaque entreprise nationale conformément aux dispositions statutaires, en étendant le pouvoir de discussion des organisations syndicales.
   - Augmentation des traitements.
   - Les 40 heures.
   - L’intégration de l’indemnité de résidence dans le traitement.
   - Réforme des catégories C et D.

Dans le secteur privé
   - Ouverture de négociations avec le CNPF et par branches d’industries.
   - Établissement de véritables Conventions collectives.
   - Action contre les disparités régionales.
   - Réduction du temps de travail sans perte de salaire.
   - Amélioration des conditions de vie des catégories défavorisées.
   - Relèvement du SMIG et sa fixation à 3,04 de l’heure, y compris dans l’agriculture.
   - Indemnisation contractuelle du chômage partiel.

Pour tous
   - Suppression des abattements de zone.
   - Abaissement de l’âge de la retraite.
   - Augmentation de 20 % des prestations familiales.
   - Allègement de la fiscalité qui frappe surtout les salariés.
   - Défense et amélioration des droits syndicaux.

Les travailleuses et travailleurs,

S’ÉLÈVENT contre les atteintes aux droits syndicaux dans les entreprises en particulier contre les menaces et pressions dont certains travailleurs sont l’objet à l’occasion de la grève d’aujourd’hui.

CONSIDÈRENT cette journée comme une étape importante pour l’ensemble des travailleuses et travailleurs.

S’ENGAGENT à poursuivre l’action sous les formes qui seront décidées par entreprises, par corporation ou à l’échelon des confédérations.

 

le 21/03/2022 à 16:50

Source : Centre Presse

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