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0618812/12/1966CHATELLERAULT

UN MILLIER DE MANIFESTANTS DES BASES AMÉRICAINES SE HEURTENT AUX FORCES DE L'ORDRE

Au cours de leur meeting à Châtellerault

Un meeting de protestation a groupé, samedi à Châtellerault près d’un millier d’employés des bases U.S. de l’Ouest de la France. Des délégations des camps et bases de la région Poitou-Charentes, Chinon, Tours et Orléans avaient tenu à s’associer à cette manifestation revendicative. Celle-ci constitue une étape dans « l’escalade » des négociations qui s’étaient engagées, il y a quelques mois, entre les responsables des comités de défense et le gouvernement

Au cours du meeting qui se tint au Théâtre, MM Biard, président, Colin, vice-président, Ménard, secrétaire général, prenaient la parole pour faire le point de la situation et analyser les conséquences socio-économiques et enfin préciser à nouveau les raisons pour lesquelles les comités ne sont pas d’accord avec les mesures prises

« Tout d’abord, le point le plus important de tous, la question du réemploi : bilan : 3.500 personnes à reclasser dans l’Ouest et le Sud-Ouest. Car, aux 3.200 personnes employées les bases, Il ne faut pas oublier d’ajouter les quelques 300 personnes de la Manufacture qui vont avoir le triste privilège de partager notre sort peu enviable

2.000 parmi ces 3.500, habitent la région Poitou-Charentes et qu’a-t-on à offrir à ces 2.000 sans emploi ? Vous l’avez peut-être lu dans la presse, samedi dernier : « 500 emplois vont être créés dans la région en 1967 » et l’optimisme qui se dégage des déclarations semble à peine croyable ! D’abord, je crois pouvoir dire qu’a moins d’un miracle, il y a peu de chance pour que ces emplois deviennent réalité suffisamment tôt, pour pouvoir apporter une solution, ne serait-ce que partielle, au non-emploi qui va sévir. 150 emplois tout au plus seront créés dans des délais acceptables et ceci grâce à l’activité et la ténacité de M. Abelin. Cependant, la nature même de ces emplois ne pourra intéresser qu’un nombre restreint d’entre nous.

« Je vous le demande, y a-t-il lieu d’être optimiste et satisfait, alors que de toute évidence, 1.500 d’entre nous au moins sont promis au chômage pour la seule région Poitou-Charentes. La situation n’est guère plus brillante et parfois pire pour les employés des bases en dehors de cette région, je veux parler des bases de Chinon, Saumur, Saint-Nazaire et Captieux.

Alors, la surprise fait place à l’incrédulité, puis à l’inquiétude qui elle-même cède le pas maintenant, à la colère quand le Gouvernement veut, par ses représentants, nous empêcher de manifester notre indignation devant une telle situation, tout en proclamant qu’ayant, somme toute - et je cite - fait de gros efforts il n’en attend cependant pas de remerciements ».

Il devait poursuivre en parlant des points de désaccord avec le Gouvernement et aboutira à l’énoncé des mesures, demandées par le comité à l’intention des licenciés.

Les responsables des unions locales des centrales syndicales présents a la tribune, devaient également apporter le soutien de leur syndicat.

M. Pierre Abelin, député-maire, vint ensuite au micro pour parler des efforts de la municipalité en vue de créer des emplois et assurer les participants, de la lutte engagée pour leur venir en aide. Il devait parler de la difficile reconversion de la MAC, dont il ne faut pas se leurrer sur l’avenir et stigmatiser les incohérences de l’aménagement du territoire. Sa conclusion fut réservée a son souci, devant la soudure qui doit s’effectuer entre le moment des licenciements et le reclassement de cette main-d’œuvre locale.

Heurts avec les Forces de l’ordre

Les manifestants décidaient ensuite de porter en cortège, au bureau de Postes de Châteauneuf, une lettre au Premier ministre. En effet l’assemblée venait d’adopter le texte d’une motion. Celle-ci devait être remise à la sous-préfecture, mais les responsables du Comité, ne reçurent pas de réponse. Aussi la motion fut adressée à M. Pompidou.

M, Abelin, député-maire et Laire, adjoint, ceints de leur écharpe tricolore, entouré de Me Parthenay, de M. Legrand et Marie, conseillers généraux et des élus de Châtellerault, de la circonscription, étaient en tête quand le cortège s’ébranla. Des pancartes revendicatives hérissaient le cortège, fort d’un millier de personnes. Des cris : « des sous Charlot.., des sous Pompidou » étaient scandés. Au bout de l’esplanade, les manifestants se heurtèrent à un premier barrage de gardiens de la paix et passèrent outre.

Plus loin, sur l’avenue menant au pont Henri-IV, des éléments de la CRS 18 de Poitiers s’opposèrent aux manifestants. M. Abelin fut bousculé. Une échauffourée s’ensuivit et quelques bousculades assez brutales, stoppèrent un instant le cortège qui continua cependant sa marche. Parvenus au bureau de postes, MM. Ménard et Colin mirent à la boîte la lettre adressée au Premier ministre. Puis les manifestants se dispersèrent.

La résolution

Les travailleurs des bases alliées de l’Ouest de la France, convoqués par le Comité de défense du personnel et le Syndicat Force Ouvrière, appuyés par la population châtelleraudaise et les élus de la région, se sont réunis le 10 décembre 1966, au Théâtre municipal de Châtellerault et ont adopté le texte qui suit :

« Le personnel des bases, conscient que tout préjudice réclame réparation, affirme que le Gouvernement français, en exigeant le départ des alliés (donc son licenciement), lui a causé un préjudice certain que les timides mesures annoncées le 20 septembre ne sauraient réparer, loin s’en faut.

« Certain, maintenant que les emplois nouveaux auxquels il soutient avoir droit, ne sauraient être mis à sa disposition avant bien longtemps et qu’un chômage massif est à prévoir ;

« Exige :
« - d’une part, une indemnisation substantielle destinée à compenser la perte inévitable de certains avantages, tels que primes d’ancienneté et de langue anglaise et le préjudice moral à subir ;
« - d’une part, une garantie décente de ressources pour tous et ceci aussi longtemps que des emplois nouveaux, normalement rémunérés, n’auront pas été offerts aux chômeurs.
« Affirme sa volonté d’intensifier ses actions aussi longtemps que nécessaire et ce, jusqu’à complète satisfaction.
« Décide, dès maintenant, pour le cas où les problèmes posés n’auraient pas reçu de solution d’ici là, de faire de la période électorale des prochaines législatives, une période d’agitation journalière sous des formes diverses, à définir par ses responsables, à qui il renouvelle sa confiance la plus entière ».

 

 

le 19/04/2022 à 10:29

Source : Centre Presse

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