0623328/01/1967CHATELLERAULT
Le Comité de défense du personnel des bases alliées pour l’Ouest de la France vient d’adresser la lettre ouverte ci-après à M. le Directeur des informations régionales, ORTF, Poitiers, qu’il nous prie d’insérer.
Cette missive est signée de M. Jean-A. Colin, vice-président.
« Monsieur le Directeur,
« Le 10 décembre dernier, un meeting et une manifestation organisés par notre comité de défense et l’Union locale de Force Ouvrière pour les bases alliées, et appuyés par les organisations syndicales, les travailleurs et les artisans châtelleraudais se sont déroulés à Châtellerault dans des conditions dont tout le monde a pu avoir connaissance, soit « de visu », soit en lisant la presse écrite.
« Il y a une semaine, le samedi 14 janvier eurent lieu à nouveau, dans des conditions différentes, un meeting et une manifestation sur la voie publique, toujours à Châtellerault.
« La conjoncture actuelle, tant en ce qui concerne la situation de l’emploi en général que celle, grave et imminente, de centaines de travailleurs des bases alliées en particulier, fait - et cela nul ne peut le nier puisque la presse écrite en a abondamment parlé - qu’il s’agissait bien, en ces deux occasions, d’un fait important et actuel, intéressant non seulement les travailleurs concernés et leurs familles, mais bien l’économie régionale toute entière.
« Quoi de plus normal, dans ces conditions, pour un organisme dont la seule raison d’être est - ou tout au moins devrait être - d’informer objectivement la population de ce qui se passe dans sa région, quoi de plus normal que de s’attendre à ce que l’ORTF, qui est, si nous ne nous abusons, UN SERVICE PUBLIC QUE NOUS PAYONS TOUS DE NOS DENIERS, se déplace avec ses opérateurs et fasse son travail d’IN FORMATEUR.
« Eh bien, il paraît que nous avons tort, et que des reportages sur le marché aux poulets de Poitiers - au fait il y avait des poulets à Châtellerault également le 10 décembre dernier ! - et sur le Palais de Justice sont plus importants à vos yeux, qu’une manifestation populaire intéressant directement ou indirectement toute une région.
« Deux voitures entrant en collision au sud du département (J.T. de lundi soir) voilà, selon les responsables locaux de l’ORTF, de l’information valable ! Des centaines de manifestants assistent à un meeting et défilent dans la rue, en appelant à tous pour la sauvegarde de leurs intérêts menacés ? Sans importance ! Merci pour eux...
« Nous savons - vous l’avez dit vous-même naguère, d’un ton sans réplique, à notre envoyé - qu’en matière de reportage, seul le directeur des informations régionales est habilité pour décider ce qui doit être traité, Cela dit, nous ne pouvons admettre, en tant qu’USAGERS PAYANTS D’UN SERVICE PUBLIC c’est-à-dire d’AYANTS DROIT, que le parti-pris le plus flagrant et le plus absolu guide ces décisions, au gré de tendances qui ne sont que trop évidentes, et au nom desquelles, par exemple, la ville de Châtellerault (36.000 habitants) est systématiquement ignorée de vos... objectifs (si l’on peut dire!). Serait-ce, comme on le dit, parce qu’on y a « mal voté » ? Mais ceci est une autre histoire, et de toute manière les auditeurs et futurs électeurs savent à quoi s’en tenir, malgré (ou à cause de) cet ostracisme.
« De deux choses l’une : ou bien la Direction de l’ORTF en n’assurant pas, à deux reprises, le reportage d’un événement important pour la région, (que vous le vouliez ou non) n’est pas, professionnellement parlant, à la hauteur de sa tâche ; ou bien il faut admettre que des ordres d’En-Haut exigent que l’information soit « conditionnée », et dans ce cas l’ORTF faillit à son rôle d’INFORMATEUR IMPARTIAL, trompant ainsi l’opinion dans un but évident. Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit d’un véritable scandale, que nous dénonçons avec force.
« Nous sommes sans illusion, ce n’est pas notre lettre qui changera grand-chose, car nous savons très bien qu’en dépit de nos dires vous n’êtes pas libre de diffuser l’information telle qu’elle se présente, et que seul le point de vue du « Docteur tant mieux « (Pas de vagues !!!) doit prévaloir sur le petit écran comme sur les ondes. Et nous vous défions de nous prouver le contraire !
« En nous adressant à vous ainsi, publiquement, nous avons conscience de défendre, en tant qu’usagers payants d ’un service public, une juste cause : le droit à la vérité. Est-ce trop demander ?
« Veuillez agréer, Monsieur le Directeur, l’expression de nos sentiments les meilleurs. »
le 02/05/2022 à 14:43
Source : Centre Presse
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