CGT

Se connecter

Réunion publique et contradictoire sous les auspices de l’Union des syndicats de la Bourse du Travail, l’Association Républicaine des Anciens Combattants et le Groupe d’études sociales de Châtellerault (samedi 27 mars 1020).

Lieu de la réunion : Bd d’Estrée, salle Despal.

Durée de la réunion : de 20 h 1/2 à 23 heures.

Nombre de personnes : 800, dont plus de 200 femmes.

Physionomie de la salle : composée en très grande partie de socialistes unifiés et de socialistes dissidents, animée sans tumulte ni incidents sérieux.

Orateurs inscrits :
- M. Blum Léon, maître des Requêtes au Conseil d’État, député de Paris.
- Aussoleil, député de la Corrèze.
- Barré Henri, ouvrier métallurgiste de Poitiers.

Composition du bureau :
Président : M. Day, industriel, conseiller municipal.
1^er assesseur : M. Schmith, ouvrier Manufacture d’armes.
2^e assesseur : M. Rideau, secrétaire Bourse du Travail
Secrétaire : M. Rabillat, ouvrier Manufacture d’armes.

M. Georges Jolly, comptable à la Manufacture d’armes, socialiste unifié, présente les trois orateurs inscrits et remercie les citoyens et les citoyennes d’être venus en foule à cette réunion. Il donne la parole au citoyen Barré, ouvrier métallurgiste de Poitiers, socialiste révolutionnaire.

Le citoyen Barré parle de la journée de 8 heures, loi démocratique combattue par les capitalistes et la réaction. Cette loi avait été votée par la précédente chambre dans le but de sauvegarder la liberté du travail et de protéger les travailleurs contre l’exploitation dont ceux-ci ont été trop longtemps victime.

La loi de 8 heures a l’avantage de procurer de l’ouvrage à tous et, si elle fait l’objet de violentes attaques de la part de certaines classes de la société, c’est que les bourgeois et les capitalistes ont intérêt à lui faire échec pour différentes raisons, dont la principale est le bien-être qu’elle procure à tous ceux qui peinent dur et ferme pour nourrir les parasites qui vivent à leurs dépens.

Le citoyen a été véhément et violent. Dans sa longue diatribe il a préconisé le renversement du régime actuel et conseillé aux ouvriers de ne travailler que lorsque cela leur plairait.

Il a été chaleureusement applaudi.

2^e orateur : M. Aussoleil, député de la Corrèze.

Le député de la Corrèze a parlé du résultat au point de vue socialiste, des dernières élections législatives.

L’échec des groupes avancés et des socialistes en particulier, est dû au manque d’organisation de la classe ouvrière. Si le Bloc national avait triomphé, c’est grâce à la propagande faites par les divers partis composant ce Bloc et en particulier par l’argent de la réaction, à dépenser sans compter pour diviser les voix socialistes et les voix républicaines, afin de faire arriver au pouvoir un très grand nombre de ses partisans.

3^e orateur : M. Blum, député de Paris

Le député de Paris a parlé de la vie chère.

Ce problème est le plus angoissant qui existe à l’heure actuelle. Il provient de plusieurs causes. Loin de s’améliorer, il devient de plus en plus inquiétant. Les mesures prises par le gouvernement pour pallier ce fâcheux état de choses sont, non seulement insuffisantes, mais encore de nature à élever davantage le prix des divers objets et denrées nécessaires à la vie.

Pour le blé, dit-il, on va revenir à la liberté du commerce, mais comme cette céréale, en raison des fluctuations du change, vaut 140 fr le quintal dans les pays étrangers, nous allons le voir passer de 73 fr le quintal (prix actuel) au prix indiqué plus haut. D’ici peu, nous serons donc obligés de payer le pain 2 fr 10 le kilo.

Pour les Cies de Chemins de fer, les transports augmentés de 11 %, ont permis à ces Cie d’augmenter leurs dividendes d’une façon scandaleuse. Et la marchandise subissant l’effet de cette augmentation, va être payée encore plus chère par le consommateur, d’où l’élévation du coût de la vie pour la classe ouvrière et pour les pauvres.

Les impôts augmentent sans cesse. Notre dette atteint actuellement 250 milliards. Treize milliards d’impôts nouveaux vont grever le contribuable et, si l’Allemagne, qui doit verser annuellement 25 milliards, ne s’acquitte pas de sa dette, ce ne sera pas 13 milliards qu’il faudra payer mais bien 20 milliards au moins.

Un ordre du jour, présenté par le citoyen Day, approuvant les déclarations des orateurs a été mis aux voix et voté à mains levées.

La sortie s’est effectuée dans un calme absolu au chant de l’Internationale.

Aucun indicent ne s’est produit.

Châtellerault, le 28 mars 1920
Le commissaire de police