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0664928/05/1968POITIERS

PLUSIEURS MANIFESTATIONS ONT MARQUÉ LA JOURNÉE D’HIER

Cheminots, Postiers, Hospitaliers, Employés communaux et Étudiants

Au huitième jour de grève, la situation demeure sans changement dans le département de la Vienne, qui reste paralysé dans la plupart de ses activités. Au mouvement profond de ces Jours derniers est venu hier s’ajouter un élément nouveau. La grève a gagné le bâtiment et sur la ZUP la SCEPER s’est mise en grève. On signalait également le même cas dans une importante entreprise châtelleraudaise, et des informations recueillies en fin d’après-midi laissaient supposer une extension pour aujourd’hui dans ce secteur.

Sur le plan des industries, tant à Poitiers qu’à Châtellerault, la situation est identique à celle de la semaine passée, tant dans le domaine de la métallurgie que dans celui de la chimie, la paralysie est totale.

A la SNCF, grève totale, ainsi qu’à l’EDF – GDF. Des coupures ont eu lieu hier, pour trois industries qui travaillaient, l’une à Poitiers, l’autre à Châtellerault, la troisième à Loudun.

Domaine Financier : poursuite dans les services du Trésor, à j’annexe de la B. de F.

La MAC de Châtellerault est toujours en grève avec occupation des locaux, ainsi que le dépôt Hawk, poursuite chez les hospitaliers, à l’URSSAF, aux Ponts et Chaussées, à la Sécurité sociale.

Dans l’enseignement, poursuite du mouvement général. Pas de classe dans le primaire, pas de cours dans le secondaire, grève totale à l’Université. La mairie de Châtellerault est toujours fermée.

La journée d’hier

Reprise du trafic des transports urbains hier matin à Poitiers.

Au cours d’une réunion qui s’est tenue, salle des Pas-perdus à la gare de Poitiers (Photo : Salle des Pas-perdus, les cheminots se sont réunis pour décider des suites de la grève), les cheminots en grève ont décidé de poursuivre leur mouvement au cours d’un meeting. Chez les postiers, poursuite de l’action. Hier marin, Ils ont occupé les locaux du central téléphonique de Poitiers, ceux de la recette principale, des mesures. Ensuite, ils se sont rendus au nombre de plusieurs centaines à la préfecture de la Vienne, où ils ont remis un cahier de revendications précises aux autorités. Le mouvement est suivi 11 100 %.

Cinq meetings ont marqué la journée d’hier, celui des cheminots et des Postiers dont nous venons de parler, puis celui des hospitaliers réunis à la Milétrie, celui des employés communaux venus en cortège déposer une motion à l’Hôtel de ville, celui de l’UNEF qui termina la journée, On en lira les comptes rendus par ailleurs. Tous se déroulèrent dans l’ordre le plus parfait et sans incident.

Dans les PTT

Au cours du meeting journalier, les responsables ont fait le point de la situation. Ils constatent avec satisfaction que le mouvement commencé dans les PTT le 20 mai 1968 n’a fait que s’amplifier et s’intensifier. Rappellent qu’au moment où les négociations vont s’engager les Postiers en lutte durcissent leurs positions. C’est pourquoi les grévistes à l’unanimité ont décidé d’occuper et réoccuper les locaux où ils sont majoritaires : le central téléphonique, l’automatique, les mesures, la R.P.

Le comité réaffirme la volonté des Postiers de voir s’ouvrir au plus tôt les négociations.

Une motion a été rédigée dans ce sens et votée à l’unanimité par l’assemblée.

L’ensemble des grévistes a accompagné la délégation jusqu’à la préfecture pour la remise de la motion au préfet de région.

La même motion a été remise aux trois directions des Postes et Télécommunications.

Les hospitaliers invitent la Commission administrative à siéger

Groupés devant l’entrée des établissements de la Milétrie, les hospitaliers en grève, avec leurs banderoles revendicatives ont écouté M. Tourancheau (secrétaire départemental FO). Celui-ci fit le point de la situation, après 5 jours de grève. Il dit notamment : « Il vous faut maintenir votre volonté de manifester, pour que désormais, nous obtenions quelque chose de solide, avant de reprendre nos activités ».

Puis, les hospitaliers ont attendu l’arrivée des membres de la commission administrative invitée à siéger sur l’invitation des instances syndicales.

Leurs revendications sur le plan local, sont les suivantes :
- 40 heures de travail en 5 jours sans diminution de salaire.
- Sécurité de l’emploi pour les auxiliaires, mise en application du dernier arrêté (décret du 9 février 1968 n° 68132).
- En attendant les modifications sur le plan national, renouvellement des comités techniques paritaires avec participation des représentants du personnel au sein des commissions administratives.
- Création d’un service de médecine préventive destiné à la surveillance du personnel (arrêté du 29-6-1960).
- Création d’un service social pour le personnel et les malades.
- Étendre la journée continue aux services généraux,
- Promotion du personnel ouvrier, spécialisation et stage de perfectionnement pour le personnel hospitalier et médical.
- Amélioration des conditions de travail pour une meilleure humanisation du milieu hospitalier par une augmentation des personnels et assouplissement de certains horaires.
- Personnel administratif : amélioration des conditions de travail :
- Regroupement indispensable des divers services qui sont disséminés dans l’établissement.
- Nécessité absolue de créer des bureaux spacieux, lumineux et aérés en remplacement de certains bureaux exigus et vétustes.
- Affichage des critères pour la détermination de la prime de service.
- Suppression du cumul : retraite proportionnelle ou complète et traitement dans un emploi à temps complet.
- Service de réception pour les malades : hôtesse, pour diriger les entrants vers leur salle respective.
- Tableau dans le hall d’entrée avec fléchage des divers services.
- Création sur le plan départemental d’un comité d’entreprise.
- Locaux à la disposition des organisations syndicales (Milétrie, Hôtel-Dieu, Pasteur, Chalons) et autorisation de réunion du personnel à l’intérieur de l’établissement.

Manifestation de solidarité du personnel communal

Le personnel employé à la mairie de Poitiers (voir notre photographie en page 2) a manifesté hier après-midi sa solidarité avec le mouvement de grève. Rassemblé au château d’eau, rue Léopold-Thézard, un cortège de plusieurs centaines de personnes se formait pour se rendre à l’Hôtel de ville, en empruntant les rues de Blossac, Alsace-Lorraine, Magenta, Louis-Renard, pour aboutir dans la cour de la maison commune. Là, lecture fut donnée de la motion qu’on lira ci-après, puis une délégation fut constituée. Elle se rendait tout aussitôt auprès du député maire de Poitiers et lui remettait le texte ci-après :

« Si le personnel municipal n’a pas fait grève jusqu’à ce jour, ce n’est pas uniquement par civisme, mais tout simplement parce qu’il n’est pas syndiqué.

« Il n’en reste pas moins vrai que sans tenir compte des revendications qu’il serait appelé à formuler en d’autres circonstances il tient à manifester sa solidarité envers le mouvement national qui a lieu actuellement ».

Le meeting de l’UNEF

Rassemblés, place de la Liberté, les étudiants des facultés de Droit, Lettres, Sciences, Médecine, Pharmacie ont répondu, hier, massivement, au mot d’ordre lancé, sur le plan national, par l’UNEF. L’Union nationale, appelant, ses adhérents à cette Journée nationale de manifestations à Paris et en province, veut marquer sa volonté de poursuivre le combat universitaire, d’intensifier l’unité des étudiants et des travailleurs pour la victoire commune, précise une déclaration de l’UNEF.

La CFDT a participé à la manifestation, ainsi qu’une délégation des enseignants, de salariés des secteurs publics et privé.

Aux pieds de la statue de la Liberté

Massés autour de la statue de la Liberté, protégés par un service d’ordre, porteur de brassards, les étudiants ont entendu successivement MM, Girard, secrétaire général de l’UD CFDT, et Moutel, président de l’AGEP-UNEF.

M. Girard, parlant dans un micro portatif, s’exprima ainsi :
« Je vous apporte le salut de la classe ouvrière. A la CFDT, en effet, on estime que le problème de l’Université et ceux de la classe ouvrière, ceux de l’agriculture sont connexes. Camarades étudiants, c’est un merci que je dois vous faire. Il faut le dire : sans la lutte des étudiants, il n’y aurait pas, à cette heure, 9 millions de travailleurs en grève, Il n’y aurait pas un pouvoir aux abois et les organisations syndicales ne pourraient pas discuter avec le patronat. Vous avez osé, vous n’avez jamais reculé, et c’est le pouvoir, lui, qui a dû reculer, revenant d’un coup sur ses condamnations ».

M. Girard poursuit :
« Entre adultes, je dois le dire, sans paternalisme protecteur : une manœuvre de grande envergure est en cours pour séparer étudiants et ouvriers. On veut présenter les étudiants comme des exaltés, des irresponsables. L’honnêteté m’oblige à dire qu’une telle propagande est odieuse. Défiez-vous comme de la peste, des provocations, dans l’état actuel. la violence ne peut servir que notre adversaire commun : le Pouvoir ! ».

M. Montel, président de l’AGEP

M. Montel, président de l’AGEP, définit pour sa part le but de la manifestation, répondant au mot d’ordre de l’UNEF. Il s’éleva contre les abus des répressions policières de ces derniers tours et ajouta que les pouvoirs publics doivent se pencher sur le travail effectué pendant les journées de grève par les étudiants. Il ajouta ensuite que les étudiants protestent contre les expulsions des camarades jugés indésirables.

Le défilé en ville

Protégés par un cordon du service d’ordre étudiant, un millier d’étudiants et salariés portant des banderoles ont défilé en ordre à Poitiers. Les mots d’ordre étaient : « A bas les monopoles », « De Gaulle démission », « Cohn-Bendit à Paris », « Le pouvoir aux travailleurs ».

Place Leclerc, devant le Café de la Paix, un groupe d’étudiants hostiles à l’UNEF et à la manifestation lança des mots d’ordre contraires : « Marxisme ne passera pas », « L’armée au pouvoir » etc...

Le cortège effectuant un second passage, en chantant l’« Internationale » eut pour effet de déclencher « La Marseillaise » dans le camp adverse.

Des deux côtés, le ton monta. Maintenus avec fermeté par leur service d’ordre, le cortège poursuivit néanmoins sa route par la place de la Préfecture où à nouveau, au pied des grilles, on entonna « l’Internationale ».

M. Montel ensuite donna des directives pour la poursuite du mouvement, précisant que, aujourd’hui, les étudiants participaient à une manifestation commune avec les ouvriers.

Il devait terminer avant, de donner le signal de la dislocation, en invitant les manifestants à venir nombreux aux spectacles donnés à l’amphi Descartes. Soirées dont les produits seront versés au fonds de solidarité ouvrière.

 

 

le 22/06/2022 à 15:39

Source : Centre Presse

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