0736817/12/1970POITIERS
Des étudiants et des CRS blessés
Des dizaines d’auto endommagées
Malgré les gaz lacrymogènes, les manifestants ont édifié des barricades et riposté à coups de cocktails Molotov
Les pompiers sont intervenus à 23 h. pour éteindre des matériaux en feu
Nouvelle flambée, particulièrement grave celle-là – hier soir sur le Campus universitaire de Poitiers où la journée avait été agitée. On y parlait de grève et des cours furent perturbés dans divers amphithéâtres. Vers 17 h. 45, un accident – encore un – sur la RN 151, Poitiers – Chauvigny, mettait le feu aux poudres. Un piéton venait d’être heurté par une automobile et blessé. Immédiatement un rassemblement de quelques centaines d’étudiants se formait. Les jeunes gens s’asseyaient sur la chaussée, bloquant la circulation routière qui était immédiatement déviée par les services de police.
C’est un camion conduit par M. André Reitz, 24 ans, domicilié à La Logerie de Bonneuil-Matours, qui avait heurté Patrick Baudet, 18 ans, un étudiant de la Cité Rabelais, au moment où il traversait la chaussée. Atteint d’une fracture du crâne, l’étudiant fut immédiatement transporté à l’Hôtel-Dieu, où il fut hospitalisé.
L’engrenage
A 18 h. 15, une première barricade était dressée sur la route 151 - on devait en compter cinq au fil des heures - par les manifestants, qui ramassaient sur les chantiers voisins tous les matériaux disponibles et les entassaient. Les manifestants, pour bloquer aussi les déviations, firent mouvement dans la direction de la Rocade, où ils parvenaient vers 18 h. 45. Là, ils établissaient un nouveau barrage à hauteur de l’avenue Jacques-Cœur. Des panneaux de publicité furent arrachés et jetés sur la chaussée. A ce moment, éclatait une altercation avec un automobiliste dont la voiture fut endommagée à coups de bâton et de pierres.
Puis un cortège d’environ deux cents manifestants se forma et alla prendre position à l’intersection des routes de Chauvigny et de Limoges devant le café Joly, dans l’intention d’interdire la circulation.
A 19 h. 10, arrivait le car de police-secours dont les occupants venaient de procéder au constat de l’accident et regagnaient le centre. Il fut stoppé par les manifestants. Pour permettre le passage du véhicule, les gardiens de la paix mirent pied à terre et réussirent à dégager le fourgon.
Peu après 19 h. 15, les forces de police composées de gardiens des corps urbains et de CRS arrivaient sur les lieux. L’arrivée des voitures de police va refluer les manifestants sur la rocade, puis au niveau du campus. Là ils s’abritèrent derrière la première barricade.
A 19 h. 35, les forces de l’ordre progressaient avenue du Recteur-Pineau pour prendre position face à cette barricade. Les manifestants qui scandaient des slogans se mirent à bombarder de pierres les premiers rangs des forces de police.
Vers 20 h. 30, après une sorte de fièvre, les policiers procédaient au déblaiement de la barricade. Les manifestants refluaient à hauteur de la Faculté de Droit, tandis qu’une autre partie se massait sur le campus. Les restaurants étaient pris d’assaut et des victuailles emportées.
Gaz lacrymogènes et cocktails Molotov
Tandis que s’effectuait cette première opération, des pierres et des bouteilles d’essence enflammées étaient lancées sur le service d’ordre qui venait d’être renforcé par un escadron de gendarmerie mobile. C’est alors que le service d’ordre employa des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants. Vers 21 h. 25, des flammes jaillissaient de la barricade, les manifestants alimentaient ce feu avec de l’essence et des matériaux empruntés au chantier voisin. Dans la nuit les flammes s’élevaient tandis que frappant sur des tôles en hurlant leurs slogans, les manifestants tenaient éveillé tout le quartier de la Pierre-Levée et les résidences d’alentour.
Pendant encore un long moment forces de l’ordre en position et manifestants demeuraient face à face.
A 23 h. 10 deux barricades enlevées
A 23 heures 10, un fourgon-pompe des sapeurs-pompiers demandé par les forces de l'ordre, arrivait sur place. Sur la barricade qui continuait à flamber, des torrents d’eau étaient déversés et les policiers chargeaient. Ils réussissaient sur leur lancée, à s’emparer de deux autres barricades malgré les jets de pierres et les bouteilles d’essence enflammées. Les étudiants - toujours - refluaient vers le Campus, que les forces de l’ordre cernaient.
De la rocade à l’avenue du Recteur-Pineau, le sol était jonché de pierres et de débris de matériaux de toutes sortes, attestant de la violence de la manifestation. De nombreuses déprédations ont été commises tout au long de la voie, poteaux arrachés, voitures endommagées par dizaines.
Des blessés
Au cours de ces opérations, un gendarme mobile, deux CRS ont été atteints par des pierres lancées avec des frondes. Ils ont été conduits à l’Hôtel-Dieu pour y être pansés et le gendarme mobile blessé à la tête, reçut trois points de suture. Quand s’opéra le mouvement de retrait des manifestants vers la barricade et que le service d’ordre occupa l’avenue du Recteur-Pineau, certains d’entre-eux furent appréhendés et conduits au commissariat Central, pour une vérification d’identité qui s’est poursuivie au cours de la nuit. Une quinzaine d'entre eux se trouvaient ainsi interrogés. Parmi les manifestants, Il y avait également des blessés. L’un d’entre eux a été sévèrement touché par une charge lacrymogène qui a explosé près de lui.
le 26/09/2022 à 20:04
Source : Centre Presse
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