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Le syndicat CFDT des Compteurs-Schlumberger nous prie d’insérer cette lettre ouverte à M. Jean Riboud, président directeur général de la Société multinationale Schlumberger Limited :

« Nous adressons cette lettre au PDG « capitaliste non conformiste qui s’est nettement démarqué du patronat français traditionnel » (l’Expansion, nov. 71), à celui « qui ne répond guère à l’idée que l’on se fait d’un patron » (France-Soir, avril 70), qui refuse « toute parenté avec les organisations patronales officielles » (La Croix, avril 70).

« Vous vous êtes présenté à l’opinion publique comme un patron ayant des idées neuves, pour ne pas dire progressistes, dans le domaine socal.

« Tout dernièrement – Europe 1 - (4 mai 72), vous êtes apparu comme un patron ayant une « politique sociale et pas seulement une gestion ».

« Or, sur ce sujet, nous estimons que nous devons apporter et faire connaître notre point de vue de travailleurs appartenant à votre groupe industriel et vivant les réalités quotidiennes.

« Si la revue Entreprise (nov. 71) constate que « depuis votre accession à la présidence, en 1965, le groupe s’est étoffé et a doublé ses gains - son chiffre d’affaires est passé de 1,75 milliards de francs à 3,28 milliards HT ; quant au bénéfice il s’est élevé à 275 millions de francs » - fin de citation, que constatons-nous, nous personnel du groupe, à notre niveau ?

« Nous constatons que l’absorption de différentes sociétés a apporté des activités nouvelles au groupe, mais que dans le même temps :
- le potentiel humain s'est évanoui pour moitié,
- les activités peu ou pas rentables ont fait ou font l’objet d’une liquidation rapide et sans appel.
- que les activités et c’est là extrêmement grave, qui étaient rentables sont l’objet d'un traitement tel, qu’actuellement, sous peu elles risquent aussi de disparaitre par suite d’une incohérence dans leur gestion et leur orientation.

« Tout cela, bien sûr, conduisant peu à peu au rejet pur et simple du personnel concerné (dernier en date, 20 licenciements chez Walter).

« Nous constatons, d’autre part, une agitation incessante due à une restructuration permanente, qui s’avère néfaste à l’économie de l’entreprise.

« Nous constatons que les disparités des statuts sociaux régissant le personnel des différentes ex-sociétés existent toujours : par exemple, rien que pour les Compteurs Schlumberger, il y a quatre zones de salaires.

« Nous constatons une volonté manifeste des différentes directions de centre de freiner toute évolution de ces statuts en vue d’une harmonisation, si ce n’est une tendance à l’égalisation par le bas.

« Nous constatons, cependant un dénominateur commun dans ces statuts : ils se situent à la limite des conventions collectives ou du Code du Travail, quand il ne s’agit pas d’un recul ; par exemple les jours de congés supplémentaires alloués en cas de fractionnement du congé légal ne sont toujours pas appliqués par les directions de centre.

« Nous constatons que des salaires inférieurs à 1.000 F par mois pour 40 heures hebdomadaires sont pratiqués, (805 à Rosheim).

« Nous constatons que les conditions de travail sont aussi déplorables qu’ailleurs : des O.S. femmes s’évanouissent fréquemment à l’usine de Poitiers.

« Aussi, les assertions de la presse française vous présentant comme un « patron aux idées neuves » se démarquant du patronat français fossile, nous font-elles sursauter.

« Si ce sursaut a pu être au début empreint d’espoir, il est honnête de dire qu'actuellement ces affirmations nous irritent fortement.

« Ou bien vous êtes à l'image de ce que croit l’opinion publique et alors on se demande pourquoi cette impulsion de renouveau social ne descend pas jusqu’au niveau des directions de centre ;

« Ou alors tout cela n’est qu’hypocrisie et se trouve développé dans un but qui nous échappe à nous travailleurs (ou est-il au contraire trop clair et se développe t-il dans le sens d'une « image de marque » avec une finalité politique ?).

« Ne pouvant nous satisfaire de paroles, ne considérant que les actes pour déterminer notre jugement nous avons pris la décision, par cette lettre ouverte, de vous saisir dans votre conscience et par la même, d’en alerter l’opinion pour rétablir les faits dans leur juste réalité et ce, dans l’attente d’une action plus conséquente ».

Sections CFDT des Compteurs Schlumberger de : Montrouge, Massy, Reims, Besançon, Thiers, Pau, Rosheim, Poitiers.
Sections CFDT de : Vélisy, St-Étienne, Vinon.