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0097730/06/1917POITIERS

CAUSERIE POITEVINE - HISTOIRE SOCIALE DE LA VILLE

Propos d'avenir. Ancienne et nouvelle mentalité. Justice, sciences, industrie.

Les cités de notre département commencent à s’occuper activement de l’avenir qui leur sera réservé après la guerre. Chacune envisage dans quelles conditions, dans quelles proportions, elle pourrait être appelée à suppléer à la production des villes du nord et de l’est détruites par l’ennemi et, même à remplacer certaines industries ou entreprises disparues pour un temps plus ou moins long. (...)

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Dans le domaine de nos vieilles institutions locales qui font depuis des siècles le renom de notre ville : l’Université et la Justice, on s’agite en vue de demain. L’Université poitevine s’oriente vers des horizons nouveaux ; elle s’ingénie à trouver des moyens d’attirer les étudiants étrangers en augmentant ses programmes d’enseignement et de s’adjoindre à côté de l’enseignement littéraire et de sciences pures, un enseignement de sciences appliquées propre à créer des industriels, des agronomes éclairés et un enseignement de connaissances spéciales destinées à former des commerçants instruits, capables représenter la France avec dignité et profit sur tous les marchés du monde, prêts à la grande lutte qui va s’ouvrir après celle des armes.

Dans le domaine judiciaire nous croyons savoir qu’en vue du remaniement probable des institutions françaises, des personnalités compétente s’occupent non seulement de garder le maintien de la Cours d’appel de Poitiers qui forme avec notre faculté de droit un centre juridique important et apprécié mais encore d’obtenir l’agrandissement, le ressort de la Cours de plusieurs départements.

De son côté la Chambre de commerce poitevine, on l’a vu dans le procès-verbal de sa dernière réunion, a fait sien le projet d’organisation d’un haut et moyen enseignement commercial dans notre département déposé par M. Mathias et dont nous avons ici maintes fois entretenu nos concitoyens. Il s’agit on le sait d’éveiller dans les jeunes générations poitevines qui entrent dans la vie active, des instincts commerciaux, des idées pratiques et cela dans toutes les classes de la société. L’avenir est à l’activité industrielle et commerciale : or la mentalité de nos concitoyens est jusqu’ici resté indifférente - on peut même dire hostiles – à ces branches sociales. Et ce n’est pas d’aujourd’hui qu’il en est ainsi.

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Une analyse intéressante de cet état d'esprit assez général à Poitiers, encore aujourd'hui, a été faite il y a plus d'un siècle par le baron de Frénilly (plus tard pair de France) qui résida dans notre vielle quelques années avant la révolution.

En 1663 La Fontaine, le célèbre fabuliste, passant à Poitiers, écrivait à sa femme qu'il était dans une « grande ville mal pavée, pleine d'écoliers, abondante en prêtres et moines ». Et plus d'un siècle plus tard Frénilly était du même avis et il ajoute dans ses mémoires que c'était « une des villes du troisième ordre la plus montueuse, la plus étroite, la plus sale », Poitiers comptait alors plus de 20 000 habitants, elle était totalement dépourvue d'industrie et de commerce important mais gardait rang de capitale avec son Intendance, son Présidial, son Université, son Évêché, ses cinq chapitres de chanoines, ses 24 paroisses, ses 20 couvents, ses hôtels seigneuriaux où la noblesse riche du pays passait l'hiver (...). Les deux classes instruites d'alors n'entretenant aucune industrie, aucun commerce, la ville restait donc triste, sans mouvement d'affaires autres que ceux des hommes de loi ou occasionné par eux.

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Le peu de commerce consistait donc surtout en quelques métiers nécessaires pour fournir à l’usage de tant de prêtres, de gentilshommes, de gens de loi et aussi d’écoliers.

Eh bien, si l’on en croit les écris laissés par nos confrères de ce temps, les poitevins s’enorgueillissaient de ce caractère très spécial de leur ville ; ils n’étaient pas éloignés de soutenir que l’activité mercantile faisait « déroger » les cités comme les gens et, comme l’on ne vit pas sans industrie, la procédure était leur industrie locale !

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Tout ceci est encore vrai aujourd'hui et l'on dirait que cet article est d'hier (...).

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le 05/05/2020 à 19:04

Source : L'Avenir de la Vienne

histoire, économie

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